Le roman inadaptable de Patrick Süskind a été adapté ! Tous s'étaient cassé les dents à essayer de mettre en images le fameux best-seller, que ce soit Martin Scorsese ou encore Ridley Scott pour ne citer que eux, mais c'est finalement le réalisateur allemand Tom Tykwer (Cours Lola cours, Heaven...) qui s'octroie le luxe de mettre en scène le livre avec, il faut le dire, une certaine efficacité. Avec un souci du détail minutieux, un rythme soutenu et agréable, une image à tomber et une reconstitution réussie de la France du XVIIIe siècle, Tykwer parvient à nous faire revivre le livre sur grand écran.
Tout en accélérant certains passages et en omettant volontairement d'autres, le metteur en scène allemand n'en oublie pas sa trame principale et les détails les plus importants de son récit, ne perdant par conséquent jamais son spectateur dans cette longue histoire aussi répugnante que passionnante ou la fabuleuse épopée d'un homme invisible ne cherchant qu'à exister aux yeux du monde, commettant pour cela l'inimaginable. Des détails de sa naissance et de son enfance jusqu'à son apogée en passant par son apprentissage auprès du parfumeur Baldini (Dustin Hoffman, un brin cabotin), le film narre donc l'aventure humaine de Grenouille (l'improbable Ben Whishaw, vu dans Layer Cake), être frêle et repoussant survivant du mieux qu'il peut dans la France cruelle du XVIIIe siècle, bravant obstacles et embûches grâce son génial odorat.
Et, malgré sa durée évidente de plus de deux heures, le long-métrage ne lasse jamais et nous absorbe du début à la fin, la mise en scène soignée voire presque clippesque de Tykwer étant visuellement époustouflante. Il réussit donc à mettre en images les pages du livre à la perfection, épaulé par une interprétation au top (monstrueux Alan Rickman), des dialogues puissants, une musique exemplaire et, bien entendu, ce scénario sans équivoque mêlant drame historique d'époque et thriller haletant. L'atmosphère sale et lugubre du livre, ainsi que la force narratrice imaginée par Süskind restant intacte, on ne peut reprocher à cette adaptation que peu de choses, peut-être quelques séquences un poil trop poétiques justement. Mais dans l'ensemble et en tout et pour tout, Le Parfum reste un petit chef-d'œuvre qui ne demande qu'à mûrir.