Je suis fort déçu de cette suite. Je m'interroge sur sa nécessité en fait, étant donné que le film entier se trouve dans les 20 dernières minutes du premier volet. D'ailleurs, Coppola l'affirme lui-même : il n'aurait pas dû y avoir de suites (si je me souviens bien, il a signé les suites pour pouvoir s'attaquer à d'autres projets lui tenant plus à cœur).
La double narration ne m'a pas vraiment intéressé. Pourquoi mêler ces deux histoires en un seul flm, vu le peu de liens présentés ? J'ai bien saisi qu'au niveau des thèmes c'était intéressant, parce que Vito est à l'extrême opposé de Michael, mais tout cela était déjà palpable dans le premier volet. Ici, on a donc deux histoires, chacune se marchant sur l'autre, aucune n'étant vraiment approfondie suffisamment.
D'un côté on assiste à la reprise en main des affaires par Michael, qui se démarque donc de son père. Le début est intéressant mais fort similaire à ce qu'il se passe dans le premier volet ; la fin perd de son intensité à cause d'une absence d'enjeux, les personnages ne faisant que parler pour ne rien dire. Globalement, c'est pire que dans le premier film car l'auteur a moins de temps pour approfondir la mise en place de son récit, du coup c'est plus vite décousu (toute la partie au tribunal m'a semblé sortie de nulle part) et souvent facile (le climax du premier film l'était déjà parce que l'auteur ne décortiquait pas la mise au point du plan, c'est encore pire ici, et en plus c'est moins efficace parce que les personnages sont plus creux).
D'un autre côté, on assiste à la prise de pouvoir de Vito durant sa jeunesse. Au début, on sent que les auteurs jubilent de leur liberté, mais très vite, il résulte l'impression qu'ils doivent tout raccorder du mieux possible, comme dans bon nombre de prequels aujourd'hui. C'est dommage parce que j'étais vraiment partant pour cette histoire, au point que chaque retour au présent me faisait râler. Le personnage de Vito est intéressant peut-être parce qu'il n'est qu'une coquille vide (à l'instar du héros de "Drive") et qu'il agit avec intelligence. Encore que je fus déçu par la manière dont il a pris la place du Don... je m'attendais à ce que la proposition impossible à refuser soit plus ingénieuse que cette simple mise à mort, lui qui ne tue finalement que lorsque c'est vraiment nécessaire (du moins, c'est comme ça qu'il est présenté dans le premier film). Et puis, par après, on assiste à cette ascension sociale de manière très décousue. D'ailleurs, il n'y a pas vraiment de fin à cette histoire ou en tous cas c'est mal amené et très mal rythmé ; c'est bien parce qu'il y a une deuxième intrigue qui prend le relais que cette écriture bâclée passe inaperçue.
Holala, tout ce qu'il aurait été possible de faire si Coppola avait eu les couilles de délaisser totalement Michael pour se concentrer sur Vito. Après tout, c'était Vito, déjà, la star du premier film. C'est lui qu'on avait envie de voir, lui qui doit se confronter à un nouveau pays et s'y imposer. On aurait alors pu approfondir la manière dont il a pris le pouvoir mais aussi s'attarder sur ses enfants, afin d'établir des liens intéressants avec le premier film. Ben oui, en fait j'aurais même préféré voir l'enfance des trois rejetons du Don pendant que ce dernier établissait son empire que tout le reste. Ici, le retour en arrière permet quelques scènes intéressantes, d'autres redondantes (la dernière, le repas de famille, rassemble ces deux impressions).
Je regrette aussi que Coppola n'ait pas proposé de personnages féminins plus important. C'est un film sur la famille, et je pense que dans une famille, la mère est très importante, ne fut-ce que pour amener un contre-point au père dominant (telle que dans la famille traditionnellement présentée). Kay est ainsi bâclée (c'était déjà le cas dans le premier film), mais aussi la mère ! Pourtant, lorsque Fredo dit que leur mère lui disait qu'il avait été trouvé (à ne pas prendre au pied de la lettre il s'agit là d'une violence verbale), je me suis dit que ça pourrait donner lieu à de fantastiques scènes de famille dans le passé... au lieu de ça, la mère a le rôle d'une figurante, sans aucune profondeur, juste bonne à s'occuper des gosses et préparer le repas.
Heureusement, il y a la mise en scène impeccable du maestro. La photographie est toujours aussi léchée, rappelant les vieux clichés. Cette vieille Amérique, on y croit sans aucune difficulté et c'est un vrai plaisir de s'y retrouver. De plus, le réalisateur parvient très vite à donner une identité à chaque lieu, et ce même si on n'y passe pas beaucoup de temps (vu que les personnages bougent beaucoup et que les scènes sont toutes assez courtes).
Le découpage est toujours très fluide et sobre, simple et efficace. Avec quelques mouvements, beaucoup de plans fixes et un angle de vue toujours bien choisi, Coppola expose le mieux possible ses scènes. Et puis, même si les séquences montées en parallèle sont moins puissantes narrativement que dans le premier film, ça reste un très beau moment de cinéma, avec des trouvailles discrètes saisissantes. C'est ça qui plaît chez Coppola, c'est qu'il propose des trucs sans pour autant passer pour un poseur ; il ne cherche pas à jeter de la poudre aux yeux, il se contente de raconter son histoire en jouant doucement avec son médium.
Au niveau des acteurs, on a du bon. DeNiro fait du bon boulot (je ne sais pas si ça mérite un oscar tout de même), les autres acteurs sont corrects, ils ont surtout la gueule de l'emploi. Pacino, en revanche, est complètement à l'ouest : il ne propose qu'un visage monolithique, un jeu qui manque de variations, ce qui est très décevant après sa belle prestation du premier volet.
Bref, "The Godfather : Part II" est une grosse déception au niveau du scénario, mais reste une oeuvre visuellement irréprochable.