S'il y a un classique du film de Noël par chez nous, c'est bien le film de Jean-Marie Poiré. La pièce de la troupe du Splendid (1979) était déjà un sacré numéro, n'hésitant pas à aller vers le trash et le dramatique sans oublier de faire rire le spectateur. Un humour grinçant également présent dans son adaptation cinématographique.
Si des éléments sont rajoutés (Marie-Ange Musquin n'existait pas dans la pièce), modifiés (Zézette et Thérèse ne sont plus cousines), voire supprimés (la fin est très différente) ; Le Père Noël est une ordure ne perd rien de son mordant au cinéma. Poiré aurait pu rester dans un décor unique comme au théâtre (soit celui des locaux de SOS Détresse Amitié), mais il préfère montrer d'autres décors pour ne pas faire du théâtre filmé. D'abord avec les frasques de Félix (Gérard Jugnot) dans les rues de Paris ou chez lui ; le final ou les aventures de Josiane Balasko dans l'ascenseur de l'immeuble.
De même, le réalisateur signe parfois des scènes étonnantes comme ce travelling avant amenant à la cuisine où Félix et Zézette (Marie-Anne Chazel) découpent un corps. Une scène génialement angoissante qui ne repose que sur des bruitages, ce que disent et font les personnages et sur la suggestion (on ne verra jamais le corps). La scène de sexe entre Pierre et Thérèse (Anémone) s'avère bien glauque également, au vue des pulsions dégueulasses du personnage de Thierry Lhermitte entrevues en début de film à travers sa magnifique peinture (copain comme cochon...).
Le film n'épargne personne, allant du couple totalement barjo à la patronne coincée dans l'ascenseur et qui sert de bélier. Les membres de SOS Détresse Amitié apparaissent comme des gens faussement bienveillants et égoïstes. La preuve avec Katia (Christian Clavier), travesti pris en charge avec peu d'égard par les bénévoles alors qu'il est dépressif et mal traité par sa famille. Idem avec le sympathique voisin bulgare (Bruno Moynot) qui est une plaie pour Pierre et son palais.
Poiré signe une adaptation efficace et jubilatoire, bénéficiant d'un casting aux petits oignons (Michel Blanc n'apparaît que vocalement, mais quelle apparition ! ). Une comédie corrosive qui est peut-être le meilleur film de la bande du Splendid. Ou du moins le plus travaillé. Si vous ne le savez pas, un remake a été réalisé par Nora Ephron avec Steve Martin, Juliette Lewis, Anthony LaPaglia, Liev Schreiber, Madeline Kahn et Rita Wilson dans les rôles autrefois joués par Lhermitte, Marie-Anne Chazel, Gérard Jugnot, Christian Clavier, Balasko et Anémone. Un film qui a une aussi belle réputation que L'embrouille est dans le sac (remake d'Oscar, autre adaptation d'une pièce de théâtre) et qui n'existe même pas en DVD en France.