Bon, il est tard, j'ai envie de pioncer, mais j'aime bien écrire une critique d'une découverte à brûle pour point, sans trop y réfléchir. Et puis franchement, ça fait vraiment trop longtemps que j'ai pas parlé de dinos... Depuis cinq critiques au moins... Diantre.

Donc je continue ma découverte poignante de l'oeuvre de Don Bluth avec un film dont je gardais de vagues souvenirs d'enfance, mais force m'est d'avouer, là, après visionnage, que je ne me rappelais absolument pas de ça. Je n'avais d'ailleurs peut être bien vu qu'une des nombreuses suites de ce film, genre "Petit Pied sur Mars" ou "Petit Pied versus Predator", ce qui expliquerait l'arrière gout de déception qui restait sur le bout de ma langue quand je devais parler des vagues souvenirs en question. Nan nan, cette première aventure ne laisse pas la place à la déception, elle donne tout ce qu'elle annonce dans son titre. Ce dessin animé est une petite merveille.

Commençons par faire le gros connard. Parce que quand je parle de dinosaures, j'aime bien ça moi, faire le gros connard. D'un point de vue scientifique, chronologique, (pré)historique, comme vous voudrez, l'ami Bluth se fout royalement de notre gueule. Ah ça, tout est permis hein, du grand n'importe quoi. Apatosaurus côtoieront donc dimetrodons (mais ouiiii), triceratops (biensûuuurrr), tyrannosaurus rex (allez, allez), parasaurolophus, ptéranodons ou encore pachycephalosaurus, ces derniers étant, pour l'occasion, présentés comme des espèces de monstres psychopathes de destruction massive avec un pointeur réglé sur "tabasser à coups de boule et mordre tout ce qui à l'air vivant". Bref, cet énorme pot pourri absolument hérétique de la plupart des espèces stars auprès des enfants (et pas que nan nan pas que) ne respecte absolument rien et écrase bien des limites pour servir son image. Alors... Verdict ? Et bien merci Don Bluth. Merci pour ces images justement, Ô magicien du merveilleux que tu es, crachotant ta créativité fascinante du bout de ta plume superbement inspirée.

Oui, merci. Merci bordel de merde d'arriver à faire encore rêver de la sorte le gosse vorace, boulimique de sauriens qui trépigne en moi dès l'annonce pesante d'un reptile antédiluvien sur l'horizon, déliant son cou dans un mouvement d'une voluptueuse grâce sur un coucher de soleil aux teintes pastelles, pataugeant dans les marais brumeux luisants d'un glauque apaisant, ombre dantesque et gueule gargantuesque arrachant placidement algues et fougères, l'oeil bienveillant sur une progéniture balbutiante jouant dans les hautes herbes mouvantes et feuilles irisées de leur pas hésitant de nouveaux nés dans ce monde de géants.
Un monde vierge, grouillant, glapissant, dégorgeant de formes bizarres ou tout est aussi inconnu qu'étrangement familier. Un monde de marres, de lacs et de ruisseaux, de volcans et de roches déchiquetées dans des plis et torsions torturées se déroulant sous nos yeux comme les pages peintes d'un livre illustré d'antan, théâtre avidement désiré où bien des êtres de fantasmagorie ont traversé les époques pour se donner rendez-vous sous les yeux d'un gamin émerveillé par ces décors délavés d'une terre oubliée, pesant d'une émouvante atmosphère de limpidité, un climat d'une pureté touchante, sur ce paysage aussi intouchable qu'une ultime rêverie avant l'éveil, laissant le goût de l'enlèvement, arraché qu'on est à cette fable reptilienne au bout d'une courte heure, comme entraperçu dans l’entrebâillement d'une porte miraculeuse involontairement délaissée.

Après avoir été étonné et touché par Fievel et totalement conquis par Brisby, Le Petit Dinosaure qui partait pourtant grand favori reste un cran en deçà des deux précédents. La faute à des personnages un brin moins attachants que dans Fievel, et surtout bien moins "forts" que dans Brisby, qui lui se hisse parmi les plus belles galeries de tronches que le cinéma d'animation ait pu créer. Non, Petit Pied et ses potes ont un côté largement bambin glapissant qui peut exaspérer un peu, et on ne peut que saluer la performance incroyable du réalisateur pour rendre l'ensemble si poétique et simplement "beau" malgré ça. Son talent pour le rythme et l’enchaînement des scènes aussi bien dans les décors époustouflants que dans l'animation, définitivement excellente, servant une vision de l'art animé très personnel au côté sombre et macabre omniprésent, aussi potentiellement dérangeant que subtilement émouvant, fait vite oublier au dinophile que je suis les "Oui oui oui !! Non non non !!" de Becky ou autres piaillements de son entourage enfantin.

Il me faut une scène. Une scène marquante. Il y en a une de réellement impressionnante, sonnant de son grondement violent les cloches annonciatrices d'un mal en lice pour la compétition de la scène de mort parentale la plus déprimante du cinéma d'animation. Il s'agit de la première attaque du "Dents Tranchantes" qu'on appellera Rex pour l'occasion. Le film est de 1989, et l'idée de dinosaures purement bipèdes est relativement nouvelle (nan nan je vous rassure je vais limiter en blablas sur les dinos...) mais Bluth anime Rex avec toute la grâce voluptueuse de féline fluidité du prédateur rapide et véloce à sang chaud que l'on admet désormais communément. On sait qu'il bougeait comme ça, mais cette idée venait tout juste de germer. Rex ici n'est pas le pseudo allosaurus lourdaud et pataud se servant de sa queue comme trépied et marchant comme un bulldozer bourré qu'on peut voir dans Fantasia. Nan, ici, Rex, avant l'attaque, est une ombre fugitive et sinueuse qui trace dans son sillage un art de la prédation qui a quelques millions d'années. Et la scène d'attaque survient. La Rex devient le bulldozer, et la mère de Petit Pied lui fait face. Rien que pour cette scène, accompagnée de la partition de James Horner, ce film se doit d'être vu. Un duel épique. Une relique animée d'un temps de dragons oubliés, qui reste à ce jour, avec Fantasia, ce qui s'est fait de mieux en illustration mouvante de cette Ère de cruelles merveilles.

Le jugeant à peu près équivalent à Fievel mais tout de même bien en dessous du merveilleux Brisby, je me dois de remercier encore Don Bluth pour ses contes animés et ses enivrantes fables. Je me dois de le remercier pour faire à nouveau vivre le marmot en quête de lézards géants qui ne sommeil que d'un oeil quelque part dans ma caboche. Et je me dois de le remercier de m'avoir prouvé que je pouvais être parfois d'avantage touché par une histoire de mulots que de poulet-reptiles géants déplumés pleins de dents et de griffes.

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le 15 mai 2013

Modifiée

le 15 mai 2013

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zombiraptor

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