Monicelli, c'est de la pure comédie. Il traite parfois de la répression d'une classe inférieure (notamment à travers le vol, comme dans Gendarmes et Voleurs six ans plus tôt), et se fait donc critique de la société italienne, avec un humour insistant et décalé.
Le Pigeon est totalement burlesque. Les exagérations dans le jeu des acteurs où le grotesque provoqué par certains dialogues ou certaines situations ne laissent aucun doute quant à l'objectif drolatique du film. Cependant, ça a beaucoup vieilli, et dans le meilleur des cas, Le Pigeon m'a prêté quelques sourires, sans jamais toucher à l'esclaffement.
Et si l'humour ne prend pas, alors le film devient vite ennuyant, et on ne sait pas à quoi se raccrocher. La mise en place est assez longue, car elle ne sert qu'à préparer la scène finale, la scène du braquage, qui pour le coup est à la hauteur de l'attente. Le pari est tellement perdu d'avance que les personnages sont tournés en ridicule, ce qui ne les empêche pas de persévérer, et par la même occasion de se ridiculiser plus encore.
Mais ces personnages, ils ne sont pas vraiment intéressants ou attachants. Ils sont souvent des stéréotypes exacerbés (le sicilien qui séquestre sa sœur), et reflètent tous la même classe sociale. L'ennui, c'est qu'il faudra attendre la comédie à l'italienne tardive, à partir des années 60, pour que l'aspect tragi-comédique soit davantage mis en avant, ce qui va de pair avec des personnages aux caractères plus subtils et probants. Je pense par exemple au Fanfaron de Dino Risi, où l'on ne sait pas trop si l'on doit rire ou non d'une situation à la fois réaliste, saugrenue et inquiétante.
Le Pigeon n'est jamais déroutant ou insolite. Il cherche à divertir et à faire rire, ce qui rend peu percutante sa critique de la société italienne de l'après-guerre et sa pauvreté inextricable. On rit du pauvre, on rit lorsqu'il échoue dans ses déviances, on rit lorsqu'il est forcé de retourner travailler. Mais à aucun moment on ne saisit la gravité du propos suggéré, car la mise en scène ne s'y prête pas. Le Pigeon aurait pu être percutant, mais c'est dommage qu'il se cantonne à son rôle trop simpliste de comédie.