Voilà un road-movie atypique. Il y a cette ambiance à la Rozier et si la respiration globale est plus inégale et donc moins hypnotique, surtout dans la première partie, l’idée d’une fuite qu’on ne maîtrise pas plane constamment sur le film. Liberté de mouvement et de création qui se joue aussi en amont puisque c’est un scénario à cinq mains que l’on accouche : Cavalier + ses quatre acteurs : Chicot, Bouchitey, Crombey, Saint-Macary. Au départ, un vendeur de voitures aux prises avec un client récalcitrant est envoyé par son patron pour conduire la Chevrolet d’un client important entre Lille et Cannes. Il annule alors son week-end familial ce qui blesse sa femme qui lui reproche, apparemment pour la énième fois, de servir de bonne poire. Bref, un mariage qui bat de l’aile. Il prend finalement la route, accompagné d’un copain. Et lors de leur première escale pipi ils se retrouvent contraint d’embarquer avec eux deux trublions, aussi menaçants que délurés, sans destination particulière mais parés pour filer eux aussi vers la Méditerranée. Le voyage ne sera bien entendu pas de tout repos. Il faut voir comment le film glisse et se perd, devient plus aimable dès lors qu’il creuse ses personnages en les rendant forcément moins antipathiques. Ça rit, ça crie, ça improvise, bref c’est électrique et débridé. La mise en scène est superbe, elle s’adapte parfaitement aux événements. Ce n’est que du mouvement, un peu saccadé, fragile, dissonant. Et le film regorge de moments à la fois légers, drôles et géniaux. Et finit par traiter chaque personnage de façon individuelle sans jamais lâcher l’idée de voyage initiatique groupée, comme chez Rozier. On plane moins que devant Les naufragés de l’île de la tortue, sorti la même année, mais plus on s’enfonce plus le film est fort. L’arrivée de l’enfant change évidemment la donne et à ce titre, la scène finale dans le train est une pure merveille.

JanosValuska
7
Écrit par

Créée

le 19 sept. 2015

Critique lue 519 fois

6 j'aime

JanosValuska

Écrit par

Critique lue 519 fois

6

D'autres avis sur Le Plein de super

Le Plein de super
Zogarok
4

Critique de Le Plein de super par Zogarok

Après quatre films relativement conventionnels (dont L'Insoumis et La Chamade), Alain Cavalier commence à prendre le large. Le Plein de super marque le début de ses expérimentations, qui passeront à...

le 14 févr. 2016

12 j'aime

2

Le Plein de super
Negreanu
8

Masculinité tonique

"Klouk" travaille chez un concessionnaire dans le Nord de la France. Il essaie de conclure une vente lorsque son patron lui ordonne de conduire un véhicule à l'autre bout de la France afin de...

le 8 mai 2021

11 j'aime

4

Le Plein de super
JM2LA
9

Critique de Le Plein de super par JM2LA

Film masculin au possible, proche de la grossièreté souvent et pourtant porté par la grâce du jeu... Cavalier réussit un pari unique, celui d'une collaboration étroite avec ses acteurs qui, si mes...

le 2 oct. 2015

11 j'aime

Du même critique

Titane
JanosValuska
5

The messy demon.

Quand Grave est sorti il y a quatre ans, ça m’avait enthousiasmé. Non pas que le film soit  parfait, loin de là, mais ça faisait tellement de bien de voir un premier film aussi intense...

le 24 juil. 2021

33 j'aime

5

La Maison des bois
JanosValuska
10

My childhood.

J’ai cette belle sensation que le film ne me quittera jamais, qu’il est déjà bien ancré dans ma mémoire, que je me souviendrai de cette maison, ce village, ce petit garçon pour toujours. J’ai...

le 21 nov. 2014

33 j'aime

5

Le Convoi de la peur
JanosValuska
10

Ensorcelés.

Il est certain que ce n’est pas le film qui me fera aimer Star Wars. Je n’ai jamais eu de grande estime pour la saga culte alors quand j’apprends que les deux films sont sortis en même temps en salle...

le 10 déc. 2013

28 j'aime

8