« Le Plus Beau Métier du Monde » est un film aux intentions honorables (mettre en lumière le travail difficile des enseignants dans les banlieues), parfois très juste dans ses descriptions, mais qui se vautre totalement, principalement à cause de son personnage principal et de sa profonde naïveté (ou mauvaise fois, c’est au choix).
Commençons par le point positif : l’ambiance des écoles difficiles de banlieues est assez bien retranscrite, avec les élèves qui s’acharnent collectivement à rendre les cours impossibles, qui sont parfois arrogants, sinon carrément menaçants. La vie dans ces quartiers-ghettos est également bien décrite, pour ce que j’en sais, sans trop de caricatures. Malheureusement, une fois posés ces constats, le film n’a plus rien de bon à nous proposer. Pire : il démonte consciencieusement tout ce qu’il nous a montré d’intéressant.
Tout d’abord, le personnage de Depardieu est irritant au possible. Comment s’attacher à un mec qui trompe sa femme et ne s’engage dans une école difficile que par intérêt personnel ? (rester près de ses enfants après que sa femme l’ait quitté) Certes, ça n’en fait pas un monstre en soi, mais il n’est jamais attachant. Entre attouchements et scène de harcèlement envers une de ses collègues enseignante, tromperies entre cette dernière et son ex-femme qu’il tente de reconquérir, ses colères contre ses élèves, parfois uniquement dues à sa vie sentimentale chaotique… il est tout simplement impossible d’avoir une quelconque empathie pour ce personnage égoïste, menteur, macho et irrespectueux qu’on cherche vainement à nous faire passer pour un héro.
Ensuite, le film se morfond dans une vision angélique des cités. Certes, on se doute que tout n’y est pas noir, qu’on y trouve énormément de gens qui souhaiteraient que la vie dans ces quartiers soit plus apaisée et qui honnissent le comportement violent d’une minorité. Toutefois, en opposant une majorité de « gentils banlieusards » à une minorité de « racailles », le film tombe dans un manichéisme abrutissant, suggérant au passage qu’il suffit de séparer le bon grain de l’ivraie pour que tout aille mieux. Bien entendu, il n’y a rien de systémique dans les dysfonctionnements des écoles de banlieues, aucune cause sociale ou économique dans la violence des cités… non, tout cela n’est que le fait d’une poignée de personnes fondamentalement mauvaises qui mérite qu’on leur fasse la leçon à coup de beignes dans la tronche*. Attention toutefois de ne pas être un vilain raciste ! Même lorsqu’on est bien content que le frontiste du coin nous ait sauvé la mise, celui-ci reste profondément méprisable, et la haine qu’il a développée pour les étrangers reste fondamentalement incompréhensible (même quand ce que subit notre gentil professeur nous laisse penser que le vilain rascar a bien raison de rester terrer chez lui avec son berger allemand et son fusil).
En résumé : la té-ci, c’est la merde, mais attention de ne pas être raciste ! Il suffit de distribuer les coups aux bonnes personnes et tout rentrera dans l’ordre. Quand au harcèlement sexuel, au mensonge et à la tromperie… c’est OK.
*il faudra définitivement qu'on m'explique comment la classe qui, toute ensemble, pourrit la vie des professeurs, est subitement composée d'une écrasante majorité d'élèves plein de bonne volonté réprimée par les trois affreux du fond...