Cinq ans après Mon père, ce héros, Gérard Lauzier retourne derrière la caméra et embarque de nouveau Gérard Depardieu. Si leur précédent film était plutôt tendre, celui-ci se révèle plus sombre. Déjà, ce n’est plus l’Ile Maurice mais la banlieue parisienne, grise, laide et mal famée. Les personnages sont plus tourmentés, en tête celui de Depardieu en professeur libidineux qui fait tourner en bourrique aussi bien les femmes que les spectateurs. Son comportement tout au long du film cadre en effet mal avec sa démarche initiale et on peine à suivre ce qu’il recherche véritablement. Autour de lui, des personnages dangereux (Daniel Prévost en raciste primaire et armé, Roschdy Zem et sa bande de racailles dangereuses), des personnages instables (Guy Marchand en principal au bout du rouleau) ou qui ne savent pas trop ce qu’ils veulent (à l’image des femmes qu’il courtise).
Le résultat, plus de 25 ans après sa réalisation, est étonnant. Le film ne prend pas tout à fait la direction attendue. Certes, on trouve le portrait de jeunes qui veulent et peuvent réussir, apportant ainsi à l’ensemble son lot de tendresse. Mais certains autres sont montrés comme irrécupérables et réellement dangereux. C’est très caricatural bien sûr, mais on peut reconnaître à Gérard Lauzier cette pertinence de n’avoir pas cédé à la guimauve. Pour le coup, on n’est pas dans la simple comédie du petit professeur qui parvient à dompter de fausses petites frappes. Il sauve les bons et se débarrasse de la mauvaise graine, ce qui n’est évidemment pas la même chose. La comédie n’est, de ce fait, pas si drôle que ça et la dimension dramatique pèse bien plus qu’on ne pouvait l’imaginer.
Ce qui est, par ailleurs, frappant est l’évolution en 25 ans de certaines situations. Un film comme celui-ci n’est déjà plus possible : parler de « barbus » et du voile comme ici est désormais inimaginable. Les problématiques sociétales soulevées par endroits ont pris une dimension bien plus importante. On remarque, de toute façon, que le film vise rarement à faire rire. Hormis quelques situations bien appuyées et parfaitement identifiées, le reste s’apparente à un film social qui tient plus du signal d’alarme que du divertissement. D’où cette impression d’être face à un film plutôt bancal. S’il évite, d’un côté, de réciter la partition attendue, il empile, de l’autre, les caricatures dans un ensemble mélangeant plusieurs sujets qui ne s’emboitent pas toujours bien. On ne peut donc être que mitigé face au résultat en dépit de l’excellente interprétation générale.