Nuri Bilge Ceylan est revenu bredouille du dernier Festival de Cannes, une première pour le cinéaste turc, palmé notamment en 2014 pour Winter Sleep. Et pourtant, Le poirier sauvage est bien meilleur que son prédécesseur sur bien des plans. Par son accessibilité, tout d'abord, car le film malgré sa durée habituelle pour Ceylan (plus de 3 heures) est moins contemplatif et, au contraire, frise la surcharge en dialogues d'ailleurs plus triviaux qu'à l'accoutumée. Il n'empêche que certaines conversations, appuyées par une mise en scène époustouflante (celle de trois hommes dont deux imams, en particulier) sont passionnantes à suivre. Localisé dans un petit village de la province de Çanakkale, dans les Dardanelles (célèbre pour le site archéologique de Troie), le film tisse sa toile autour des relations entre un garçon fraîchement diplômé de l'université, aspirant écrivain, et un père insaisissable, perclus de dettes, qui fait le désespoir de sa famille. Le poirier sauvage évoque la politique turque, la religion et la littérature, entre autres, avec une liberté et une audace qui font mouche mais c'est dans sa toute dernière partie que le film trouve son acmé avec le rapport fils/père qui évolue soudain vers une sérénité inattendue. La dernière demi-heure est réellement extraordinaire, magnifiée par le talent de Ceylan à filmer les beautés de la nature. Elle fait oublier les petites longueurs perceptibles auparavant, qui ne se transforment cependant pas en ennui, dans un film qui restera parmi les plus remarquables du cinéaste, même sans récompense cannoise.

Créée

le 3 juil. 2018

Critique lue 557 fois

3 j'aime

Cinephile-doux

Écrit par

Critique lue 557 fois

3

D'autres avis sur Le Poirier sauvage

Le Poirier sauvage
guyness
8

La réalité en pleine poire, sauvage

C'est fou comme comme j'aime les films qui ne racontent pas vers où ils vont, dont on ne sait jamais si la scène à laquelle on assiste est essentielle ou périphérique, sans que cela ne gène: il y a...

le 28 août 2019

44 j'aime

8

Le Poirier sauvage
seb2046
8

L'arbre qui lie...

LE POIRIER SAUVAGE (17,5) (Nuri Bilge Ceylan, TUR, 2018, 188min) : Somptueuse fresque familiale narrant le destin de Sinan, un jeune homme universitaire fraîchement diplômé et passionné de...

le 10 août 2018

19 j'aime

11

Le Poirier sauvage
blacktide
6

Summer Sleep

Il est un fruit qui semble épouser les formes de l’existence : la Poire Sauvage et sa sublime imperfection. Difforme, âpre et dure, elle se cueille ainsi, pour devenir confiture, et libérer ses...

le 17 sept. 2018

15 j'aime

7

Du même critique

As Bestas
Cinephile-doux
9

La Galice jusqu'à l'hallali

Et sinon, il en pense quoi, l'office de tourisme galicien de As Bestas, dont l'action se déroule dans un petit village dépeuplé où ont choisi de s'installer un couple de Français qui se sont...

le 28 mai 2022

79 j'aime

4

France
Cinephile-doux
8

Triste et célèbre

Il est quand même drôle qu'un grand nombre des spectateurs de France ne retient du film que sa satire au vitriol (hum) des journalistes télé élevés au rang de stars et des errements des chaînes...

le 25 août 2021

79 j'aime

5

The Power of the Dog
Cinephile-doux
8

Du genre masculin

Enfin un nouveau film de Jane Campion, 12 ans après Bright Star ! La puissance et la subtilité de la réalisatrice néo-zélandaise ne se sont manifestement pas affadies avec Le pouvoir du chien, un...

le 25 sept. 2021

72 j'aime

13