Un film intrigant, pas en raison de son sujet, pourtant original, mais à cause de ses choix artistiques. Il pourrait rappeler Le dernier empereur, dans son ampleur et l'attention qu'il accorde au décor (et aux cadrages), mais d'étranges plans de coupe viennent troubler le rythme lancinant d'une narration inutilement étirée en longueur. Et puis les enjeux les plus importants restent en dehors des plans; à se demander si on a fait la bonne lecture de cette histoire de sacrifice et de renoncement. Les deux protagonistes se laissent entrevoir des horizons insoupçonnés : le Jésuite est troublé par l'indifférente impératrice autant qu'elle découvre en lui une qualité d'attention que personne ne lui a jamais accordée, bien qu'elle soit au centre d'un petit univers clos et extrêmement codifié. Au moment où l'on perçoit leur trouble naissant, l'histoire fait trois petits bonds et s'en va, sur une conclusion précipitée dont on perçoit mal par quel chemin elle a bien pu arriver... Suggérer, c'est plutôt habile, mais à ce point, c'est carrément risqué. Malgré tout, le choc entre les cultures traditionnelles de ce XVIIIème siècle si riche en changements radicaux, de part et d'autre du monde, est palpitant, et les us et coutumes chinois de la Cour sont évoqués avec soin. Oui, voilà, tout est soigné, mais il manque un peu de souffle, dirais-je. On se dit que cette histoire méritait davantage d'être lue que vue.