Le Printemps des petites îles (1940)
Oyama est une médecin chargée de parcourir les îles de la mer intérieure de Seto pour convaincre les lépreux, dispersés et souvent cachés par leur famille, de se rendre à la léproserie de Nagashima. Elle se heurte à la réticence des malades et de leurs familles, face à la perspective de l’éloignement et à la honte d’exposer cette maladie aux yeux de tous.
Dans la première demi-heure, le film apparaît conventionnel et surtout très didactique, au point qu’on croirait une commande du ministère de la santé japonais pour expliquer la lutte contre la lèpre dans le Japon des années 30. Mais la détermination et le dévouement du médecin, qui font parfois penser au personnage de l’institutrice dans Vingt-quatre prunelles de Kinoshita, magnifiquement interprété par Hideko Takamine, finissent par émouvoir, grâce aussi au réalisme quasi documentaire du film, avec de très beaux plans sur les îles, leurs villages et leurs habitants (on retrouve aussi cet intérêt tout particulier des cinéastes japonais de cette époque pour les enfants). L’arrivée dans un village presque désert, inondé par le soleil, vers le milieu du film, avec un beau plan en plongée sur les toits d’une maison que garde, seule, une petite fille, est particulièrement émouvante et même poétique. Le naturalisme avec lequel le cinéaste filme cette rencontre, lorsque la médecin examine la fillette, sous des cerisiers en fleurs, exprime très bien l’humanisme qui parcourt la deuxième partie du film.
Un beau journal de voyage, à la fois documentaire et lyrique, tel que seul le cinéma japonais pouvait alors en produire (on est loin de l’« image action »), qui nous laisse entrevoir la beauté des paysages insulaires du Japon, et dont la principale limite est le didactisme des 30 premières minutes, certains gros plans sur la nature dont on perçoit trop l’intention émotionnelle et lyrique, et une bande son parfois larmoyante.