Davantage une variation autour du film de guerre que du western (seul le cadre historique conditionne l’appellation de western), préfigurant par certains aspects le film de commando, ce Raid est un film qui marque par son originalité, sa sobriété et son efficacité. Centré autour de personnages sudistes qui complotent pour s’infiltrer, piller et détruire une ville du Nord alors que leur armée est en pleine déroute, il navigue tout en nuances dans une galerie de portraits des deux camps. Sans parti-pris, il s’échine à présenter avec fatalisme les faits et gestes des uns et des autres en temps de guerre. Derrière les uniformes, les amitiés sont possibles mais dès que ceux-ci refont leur apparition, une haine aveuglante s’empare de chacun.
On apprécie ici la précision de l’écriture qui mélange avec intelligence les rapports entre les différents protagonistes et l’avancée du complot mis à mal par un Lee Marvin, une nouvelle fois, parfait en personnage teigneux et ingérable. Marqué par une intrigue aux allures de tragédie (tout est, par ailleurs, très théâtral), l’ensemble maintient une tension constante même si, concrètement, il ne se passe pas beaucoup de choses à l’écran, production modeste oblige. Tout est cependant tellement bien fait (l’absence de spectaculaire s’explique aisément pendant les trois quarts du film et la fin réserve de bons moments d’action) qu’on n’y voit que du feu. Ainsi qu’il l’avait déjà fait dans Quand les Tambours s’arrêteront, Hugo Fregonese maîtrise parfaitement le suspense qu’il fait tranquillement monter.
Plus abouti à mon sens que cette précédente réalisation, mieux conduit, totalement amoral, il dépeint avec une justesse implacable la réalité de la guerre, les obligations et les rancœurs qu’elle occasionne, surtout dans le cadre d’une guerre civile. L’interprétation est parfaite, d’un Van Heflin à la fois humain et déterminé à Anne Bancroft au rôle pas aussi niais que certains rôles féminins dans ce genre de situation, en passant par Richard Boone ou Peter Graves. Adapté d’une histoire vraie finement exploitée, voilà une série B qui n’en est pas vraiment une. Plus qu’un divertissement croulant sous les feux de l’action, c’est une peinture habile des hommes en temps de guerre. Malin et efficace.