Les aventures de l’inspecteur Harry continuent. Après un troisième volet intéressant mais manquant un peu de fond et qui aurait pu mieux exploiter son potentiel, ce n’est nul autre que Clint Eastwood qui va prendre les commandes de cette nouvelle suite, trois ans après. Sudden Impact, traduit par « Le Retour de l’inspecteur Harry » en français, signe un retour en force et brutal aux origines.
« Go ahead, make my day. » Cette réplique devenue mythique symbolise le propos du film à elle seule. En effet, la traduction française du titre par « Le Retour de l’inspecteur Harry » semble éloignée du titre original, mais pourtant elle résume bien ce que ce film représente au niveau de la saga et du personnage de l’inspecteur Harry. Clint Eastwood, qui a déjà campé le rôle à trois reprises et assisté à la réalisation, prend cette fois les rênes et son message est clair : on revient aux origines du phénomène. Alors que ses prédécesseurs avaient opéré quelques divergences, Clint fait le choix de reprendre les ingrédients qui ont fait le succès et la particularité du premier volet, en les exacerbant et en les complexifiant pour obtenir un cocktail plein d’amertume, de vengeance et de colère.
Comme un symbole, la séquence d’ouverture, avec le traditionnel survol de San Francisco, se fait cette fois de nuit, présageant un film plus sombre et obscur que les précédents. Le personnage que l’on juge de prime abord comme étant l’antagoniste, se dévoile à nouveau dès les premiers instants du film, et nous assistons de nouveau à quelques démonstrations de force de l’impétueux inspecteur. Fidèle à la saga et à son personnage, Clint emprunte sans modération à Don Siegel pour que l’inspecteur Harry redevienne le fameux « Dirty Harry », celui à qui l’on refile tous les sales boulots et qui ferme le clapet des méchants sans coup férir. Cependant, Clint pousse ici la démarche au maximum, n’hésitant pas à s’aventurer sur le terrain de la caricature, dans le but, en quelque sorte, de mythifier davantage son héros, et d’exploiter au mieux les ingrédients qui ont fait la réussite de la saga, c’est-à-dire une bonne dose de justice expéditive, des répliques cinglantes, et de l’action.
Toutefois, Clint ne veut pas non plus tomber dans le piège en proposant un film simpliste et amateur. L’acteur est aussi un réalisateur qui a gagné en expérience, et il montre de nouveau ses capacités à créer une atmosphère et un climat particuliers dans ce quatrième opus, plus torturé que les précédents. Les séquences nocturnes, assez nombreuses, et les jeux de lumière prononcés, font partie intégrante de ce schéma, atteignant notamment son paroxysme lors de l’affrontement final, lorsque l’inspecteur apparaît à contre-jour, ne laissant apparaître qu’une grande ombre éclairée par la lumière, entre l’apparition fantomatique et l’apparition divine. Le réalisateur nourrit le mythe, tout en plongeant le spectateur dans une ambiance malsaine et dangereuse.
Faisant ici face à son égal féminin, l’inspecteur se retrouve de nouveau face aux dangers de la vengeance insatiable, nuançant le propos plus expéditif de L’Inspecteur Harry, et suivant notamment sur cette voie Magnum Force. Plus complexe, bien réalisé, tout en n’hésitant pas à exagérer sur les répliques cinglantes, les ressorts comiques et l’attitude de l’inspecteur, Le Retour de l’inspecteur Harry est probablement la seule suite à la hauteur du premier, voire presque supérieure à celui-ci. Clint parvient paradoxalement à montrer ce qui pourrait s’apparenter à de la lourdeur, tout en y mettant parfaitement les formes pour un rendu soigné et nuancé. Clint boucle ainsi la boucle dans le film qui aurait pu conclure la saga avec brio et éclat.