Ce n'est pas le film le plus accessible de Bergman, loin s'en faut, mais il contient en à peine plus d'une heure toutes les préoccupations, ou plutôt les obsessions (ici particulièrement mortifères) du réalisateur suédois. La vie, la mort, le sexe, l’incommunicabilité, la haine de soi ou des autres, l'absence de Dieu, la place ambiguë de l'artiste dans la société, des thèmes hautement intellectuels et métaphysiques auxquels se mêlent des réflexions plus prosaïques (voire franchement triviales s'agissant de sexualité) sur la vie quotidienne d'une troupe de théâtre, la paternité, la fiscalité ou les problèmes de transpiration d'un fonctionnaire, bref une multitude de sujets abordés en neuf tableaux à travers quatre personnages, un juge, deux comédiens et une comédienne. Conçu à l'origine pour la télévision, Le rite est constitué presque uniquement de gros plans sur des visages, dans des décors minimalistes à peine suggérés par quelques meubles devant un rideau de fond. Une austérité qui contraste avec le désordre mental des personnages: on est fasciné par le jeu des acteurs (à commencer par Ingrid Thulin qui écope d'un rôle particulièrement humiliant), ce va-et-vient permanent entre froideur et exaltation, hystérie et dépression au long d'échanges verbaux frénétiques qui ne sont en fait que des monologues, chacun(e) restant muré dans un narcissisme ou une rigidité mentale qui excluent toute bonté de coeur.