Le cinéma, ces derniers temps, semble toujours raconter les mêmes histoires. Et ressusciter des titres célèbres pour essayer d'en exploiter l'aura qui fera se déplacer le spectateur. Au risque de ne jamais renouer avec l'imagerie, avec ce que le film avait suscité comme sentiments liés au plaisir de la découverte, au choc de la révélation, si celui-ci s'avérait être bon, comme, au pif, un La Belle et la Bête live, Rollerball, Terminator, quand il s'est Genisysé, ou encore un Total Recall en mode Mémoires Programmées.
Ces temps de remake, de prequels, de reboots de figures de proue immortelles ont ainsi peu à peu fait penser à un assèchement de l'imaginaire, à une originalité en berne, à une paresse mère de tous les vices d'amoncellement facile de billets verts. Pour, dans un sentiment contradictoire, quand un studio ou un réalisateur essaie de s'éloigner des canons et des chemins empruntés par l'oeuvre originale, hurler au viol d'une franchise chérie, à la profanation de sépulture des classiques.
Tout cela pour vous dire que si vous vous attendez à revoir poindre la puissance de l'Excalibur de John Boorman en franchissant la porte de la salle de cinéma, faîtes demi-tour. Car vous serez pour sûr sacrément déçus. Pour ne pas dire plus. Comme lorsque Camelot est passé entre les mains d'Antoine Fuqua en 2004. Car Guy Ritchie fait tout simplement table (ronde bien sûr) rase de la quasi intégralité du mythe, et fait glisser ce qui reste au second plan, le temps de quelques rares scènes ultra fugitives.
La figure d'Arthur, il la plie à ses envies, à ses fantasmes, à ce qui l'intéresse, dans une relecture post moderne qui n'est pas sans rappeler (un petit peu) Chevalier, où il en fait un gamin qui a grandi dans un bordel, appelé à sortir du caniveau pour devenir roi. Juste après une introduction qui plonge à pieds joint dans un mix celtique, chevalerie et heroic fantasy, avec ses oliphants encore plus mastocs que dans Le Retour du Roi. Et pour peu que l'on ne soit pas cynique et un peu tolérant, l'entrée en matière de ce nouveau Roi Arthur emballe, et l'on y retrouve certaines afféteries que le metteur en scène affectionne depuis son Sherlock Holmes décalé et surprenant.
C'est alerte et intrigant, on adhère et on a envie d'en voir plus, en espérant que Ritchie tienne bon la barre de son entreprise jusqu'au bout, traversé en outre d'un joli bestiaire côté monstres. Mais le mélange disparate prend, même s'il déborde parfois.
Parce que cette Légende d'Excalibur commet l'erreur de ne pas uniquement se focaliser sur le voyage initiatique de son héros, qui, pourtant, était, enfin pour moi, assez riche pour nourrir un film dans son évolution avec sa némésis qui braconne, côté charisme et représentation, sur les terres du Death Dealer de Frank Frazetta. Car à l'instant où le héros s'inscrit au sein d'une guilde disparate, le film semble parfois faire du sur-place, même si les péripéties ne sont pas désagréables à suivre en elles-mêmes, et traversées de personnages un peu inutiles. Mais on se dit qu'à côté de ça, le voyage en forêt sombre méritait bien plus d'être développé, concourant à l'image très heroic fantasy que Ritchie a voulu explorer. Il manque peut être aussi un peu de face à face avec Jude Law, qui aurait mérité un peu plus de traitement shakespearien dans sa quête de pouvoir.
Mais il reste cependant de très beaux moments, une musique qui donne envie de se procurer le CD, une sorte de magie qui émane du film qui, pour certains, ne sera qu'un leurre cachant la vacuité d'une oeuvre qu'ils auront tôt fait de dénoncer, en forme de jets âcres et purulents. Cependant, il serait hypocrite de ne pas dire que le divertissement est au rendez-vous, aussi facile soit-il, aussi injurieux soit-il concernant la légende.
Car finalement, le plus gros défaut de ce Roi Arthur : La Légende d'Excalibur, c'est tout simplement de s'appeler... Excalibur.
Behind_the_Mask, qui se laisse refiler de la Kaamelott.