Appliquer le filtre de Guy Ritchie sur les légendes arthuriennes, voilà qui était culotté et de quoi autant créer l’émoi du spectateur amateur de sensations (très) fortes que de laisser n’importe quel amateur historien le visage tuméfié barbotant dans son sang. Le Roi Arthur est beaucoup de choses mais n’est assurément pas un énième film classique de fantasy ou de chevalerie. Constamment en mouvement et porté par les tambours guerriers et industriels de son incroyable score signé Daniel Pemberton, le nouveau film de Ritchie est un bolide lancé à toute vitesse embarquant ou non les pauvres âmes qui tentent le voyage. Le Roi Arthur est difficile à saisir dans toute sa globalité tant il apparaît comme un de ces films surdoués bien trop en avance sur son temps pour savoir le déchiffrer avec pertinence. Film hybride sous cocaïne et expérimental radical, Le Roi Arthur est une énigme, une chimère séduisante et dangereuse qui frappe avec violence et sans sommation. A l’image du personnage d’Arthur, incarné par Charlie Hunnam (Sons of Anarchy, Hooligans) gamin de la rue sur qui tombe une destinée bien trop lourde de prime abord, le spectateur est fauché dans cette haletante course frénétique que représente la quête de cette histoire. Guy Ritchie, véritable génie du montage, prend sans complexe le monde entier à contre-pied, préférant distribuer des mandales bien sales et favoriser la perte de repères plutôt que de prendre son public par la main dans cette aventure rocambolesque du Roi Arthur version guerilla urbaine et dark fantasy au pays de Snatch et The Witcher plutôt que du côté de chez Merlin. Le Lore arthurien y est malmené comme jamais au profit d’une générosité sans égal, renvoyant avec aise (et une fessée) la trilogie Hobbit dans les jupons de Peter Jackson, un plaisir jamais dissimulé exécuté avec une virtuosité désinvolte dont Ritchie en a le secret. Authentiquement graphique, violent et même onirique et visuellement poétique, Le Roi Arthur : La Légende d’Excalibur saccage joyeusement tous les codes du cinéma traditionnel et s’impose en tant qu’objet anachronique par rapport à son sujet. Complètement fou, difficile à encaisser en une prise, dopé à la testostérone et outrageusement audacieux, la collaboration cinématographique de Guy Ritchie et Charlie Hunnam est un divertissement avant-gardiste de durs à cuire, cynique, arrogant et résolument homérique à ne pas mettre sous tous les yeux sans avoir fait le pacte, au préalable, avec le film en sachant de quoi sera fait ce tour de magie sous acide. Une pièce unique.