Dans le petit royaume de "Takicardie" règne un roi despote et cruel au nom de "Charles V et Trois font Huit et Huit font Seize". Celui-ci est amoureux d'une adorable petite bergère qui pose sur l'un des tableaux de son château. Malheureusement pour le roi, la jeune fille rêve et n'a d'yeux que pour son jeune voisin ramoneur. Une nuit,les toiles exposées prennent vie et les deux amoureux prennent la fuite. Le roi envoie alors sa garde à la poursuite des fuyards, mais "L'Oiseau" goguenard et persifleur veille sur eux.
Le réalisateur, Paul Grimault n'avait qu'une ambition: venger l'échec de "La Bergère et le ramoneur" , un film de 1950 réalisé avec la collaboration de Jacques Prévert. Ce film avait été sabordé par des producteurs sans grands scrupules.
C'est donc en 1979 que notre Paul Grimault réalise ce fantastique dessin animé sous la forme d'un long métrage. De plus, il s'agit là d'un vibrant hommage à son ami poète disparu. Les thèmes chers à Jacques Prévert sont repris dans cet ouvrage. Ce film caustique et réaliste sent bon la lutte pour la liberté, la fidélité dans l'amour; mais il nous plonge également dans la cruauté des dictatures et la vanité d'un monarque égocentrique, déconnecté de la réalité, dépourvu de sentiments et cruel. Comme lui, sa police n'est qu'une horde de personnages serviles, déshumanisés et retors. Le toit du château est lui le symbole de la contestation et de la résistance avec cet oiseau rusé et bienfaiteur. Il domine et contrôle du haut de sa tour la situation et représente la marche inéluctable de la liberté.
Le film dénonce les oppressions que subit et risque de subir une partie de l'humanité. Mais le propos est optimiste car cet empire imprenable s'écroulera comme un château de cartes face à la solidarité et à l'esprit de justice du petit peuple. D'ailleurs le roi symbolise ce fait en brocardant le jeune homme amoureux: "un petit ramoneur de rien du tout". Et là, tout est dit...
Cette œuvre est sublime et spirituelle par ses images d'une rare beauté et tellement parlantes, par son texte fabuleux et d'une rare finesse. Voici l'un des plus beaux contes que le septième art nous a offert. Dégustons-le avec toute la ferveur qu'il mérite. En tout cas, Messieurs Grimault et Prévert sont vengés!