A-lors...
C'est vrai qu'avec ce cas, je me trouve quand même bien indulgent, comme personne. Il m'arrive d'être vraiment acerbe vis-à-vis de films (ou d'autres médias) de Fantasy dès l'instant où j'ai l'impression - et généralement, elle est plutôt bonne - de mettre pris un crachat dans la figure mais... Bah ce film, il ne m'a pas "défié" outre mesure. Il ne m'exaspère pas et ne m'excite pas. Ce film existe pour divertir les enfants... et il semble divertir les enfants.
Le Royaume de Naya est un film d'animation ukrainien - que je classerai dans la catégorie Merveilleux plus que Fantastique (à la rigueur Fantasy Féerique) - réalisé par Oleg Malamuzh, sorti cette année et apparemment adapté d'une pièce de théâtre La Chanson de la Forêt, écrite par Lessia Oukraïnka en 1911. Et je ne saurais dire par quel contexte ce film est parvenu à sortir dans les salles de cinéma (la guerre Russie-Ukraine, peut-être) mais pour ma part, le résultat final semble quelque peu moyen pour un tel "privilège".
On nous raconte l'histoire de Naya, une jeune nymphe qui rencontre un jour un humain désirant trouver la source de vie pour pouvoir guérir son oncle. Mais depuis des années, les humains sont interdits sur les terres féeriques : par le passé, une guerre avait éclaté, les humains ayant désiré contrôlé cette source magique.
Pas plus de spoil, comme à mon habitude.
Donc, pour ce qui est de l'intrigue... Bah, on retrouve les codes du personnage féerique qui a grandi avec des règles strictes et des aprioris tenaces vis-à-vis des humains mais qui, par curiosité, va se permettre de juger les dires des anciens sur le premier humain venu pour découvrir que - incroyable - tout n'est pas entièrement fondé. Alors, en soi, ça fait toujours bien le café mais force est de constater que ce n'est guère transcendant niveau originalité de scénario et c'est véritablement ce qui manque à cette création cinématographique : de l'originalité, qui parfois sort le bout de son nez, mais toujours de manière bien trop timide. Mais le véritable problème n'est pas tant le manque de créativité venant du scénario (on reste tout de même sur une création du début du XXème siècle - alors certes, entre temps de nombreuses créations du même gabarit (du moins avec la même visée scénaristique et morale) se sont permises d'être portées sur petit/grand écran - mais tout de même, c'est du déjà-vu), mais plutôt la manière dont le film est monté, à savoir n'importe comment ! Surtout en ce qui concerne les transitions qui... sont des fondus au noir ? En 2023 ? Ça existe encore ce genre de procédé ? Qui étouffe l'action au lieu de l'améliorer, de lui offrir une bonne continuité... Sans compter le découpage de scènes qui est également à désirer : des séquences courtes qui ne proposent rien d'intéressant en terme de narration, d'action ou humour, ou les moments où on passe d'un lieu à un autre à un autre en très peu de temps et sans aucun lien logique... ce qui a tendance à briser l'immersion du spectateur qui ne va pas du tout entrer dans l'univers pourtant féerique proposé ; ça casse pas trois pattes à un canard, mais force est de constater que dans l'ensemble, la faune/flore magique est plus inventive. Or voilà, la manière dont est montée l'intrigue nous empêche, non complètement, de nous immerger parfaitement dans le récit.
Concernant les personnages. Ils sont... là ? Je veux dire, à aucun moment on ne rentre vraiment dans le détail, on survole les personnalité en restant satisfait des traits de caractère que l'on a attribué aux quelques figures marquantes. Nous avons bien Naya, qui respecte la protagoniste qui désire pouvoir vivre en paix avec les humains, qui découvre leur monde et leur bonté d'âme - à noter que les "tatouages" sont plutôt intéressants, liés aux symboles des sages de la forêt. Il y a Lucas, le jeune humain qui se prend d'affection pour l'être surnaturel et le monde magique qui l'entoure mais à part eux deux... C'est plutôt vide en terme de figure impactante... Du côté des adjuvants, on a bien les fameux rigolos de service qui feront sourire deux-trois fois (mention spéciale pour le chat-grenouille ; franchement, il fallait y penser), on a l'Ancien qui a vécu la guerre contre les humains et qui fait un peu office de mentor mais le reste, c'est là sans être là et si ça aurait pu ne pas être là, ça n'aurait absolument rien changé (typiquement, les trois autres nymphes, qui symbolisent les différentes saisons de l'année). Tandis que du côté des antagonistes, la grande méchante est d'une platitude extrême et le grand rebondissement qu'elle nous propose en conclusion n'arrive même pas à nous impacter émotionnellement tant sa personne ne nous laisse ni chaud ni froid. Et ses acolytes sont du même gabarit : on a le serviteur un peu ridicule - source de séquences cocasses, bien qu'ici je n'ai pas eu le loisir de rire à gorge déployée, ni même normalement d'ailleurs - et les deux gardes du corps un peu benêts et très vite oubliables malgré un charisme minimaliste qui aurait pu fonctionner si on ne s'en foutait pas complètement. En clair, ça ne brille pas fort de ce point de vue là non plus et dès l'instant où même les personnages ont du mal à maintenir les spectateurs éveillés ou attentifs, on a beaucoup de soucis à se faire.
Tout ça pour en venir à la touche graphique de ce film d'animation qui est tout bonnement éclaté ! Qu'est-ce qui s'est passé ? On oscille entre des séquences intéressantes et des demi-heures totalement lunaires où l'arrière plan semble tellement détaché des éléments du premier plan, où les animations sont parfois horribles, où certains plans sont d'un minimalisme affligeant alors que pourtant ! Pourtant, il y a des séquences qui donnent un début de frisson ! J'en veux pour preuve les séquence concernant Naya alors de la bataille final, celles qui suivent sa discussion avec le dernier sage : là, il y avait de l'idée, là il y avait de bonnes choses à l'écran : des couleurs, du mouvement, du sensationnel... Pourquoi il faut attendre le dernier quart d'heure pour enfin d'être content d'avoir payé sa place de cinéma si chère pour venir regarder ce film ? Ce qui fait que sur près d'une heure quarante, seules dix minutes m'ont paru excellents, du moins bienvenus dans cette production avec, je le répète, des choix vraiment sympathiques, des plans vraiment bons et une tension qui enfin était palpable ! Sauf que non... ce ne sont que dix petites minutes dans une création qui se permet d'être beaucoup trop moyenne pour qu'on s'y intéresse un seul instant...
Et pourtant, concernant les décors et les lieux, il y a de bons et beaux panoramas : des paysages splendides, des structures naturelles recherchées qui instaurent et installent une ambiance véritablement féerique. Mais là aussi, outre ces quelques séquences bienvenues, on reste sur du "moindre effort" - après, je dénonce, je dénonce mais peut-être que le budget n'était pas si élevé que ça pour se permettre une qualité digne de ce nom...
Et pour les musiques, dirons-nous que le folklore musical ukrainien fait plutôt bien son travail avec des compositions intéressantes et emballantes ; bien que j'eus cru voir une tentative de reconstitution de la fête issue du film Disney Raiponce. A vous de me dire si je suis devenu fou ou non durant mon visionnage.
Le Royaume de Naya est donc une production enfantine, voire beaucoup trop enfantine. L'intrigue n'est guère surprenante et ne se permet pas de proposer quelque chose de neuf, les enjeux et la morale sont présents, mais uniquement présents. Les personnages le sont tout autant et c'est triste de voir tout ça comme ça lorsque l'on a une séquence d'une dizaine de minute qui vaut le coup d'être regardée. Alors oui, je suis indulgent, mais ce film m'a malheureusement plus fatigué que diverti. Néanmoins, il semblerait que pour les enfants, ce soit peut-être un divertissement, non pas de première qualité, mais qui vaille tout de même le coup, mais pour ma part, c'est juste un immense dommage...
Et n'oubliez pas que la Fantasy nous appartient !