Mystère austère au presbytère
Putain, on est pas là pour rigoler !
Si vous ne l'avez pas encore vu, soyez éclairés au moins sur ce point: ça va chialer dans les chaumières.
On est d'accord, rien ne se prête à la gaudriole à priori: campagne du nord de l'Allemagne protestante, un coin pour le moins besogneux au sein d'une population plus réputée pour son sens de la discipline que pour son goût de la déconne débridée et libertine.
C'est d'ailleurs mon principal (seul ?) reproche sur ce film. Les éclaircies sont rares (il n'y a que les relations de l'inscrit et sa future promise), les respirations anémiques, la plongée dans le pesant est constante. Alors certes, je conçois tout à fait que le milieu paysan et villageois, de tout temps et de toute époque, n'a que très peu inspiré de farces légères. Mais il me semble cependant qu'il existe des possibilités de voir les choses sous un jour moins noir. Pour dire, même Bergman a peint des tableaux finalement plus funs de la condition rurale que ne le fait Haneke ici.
Chaque entité du village possède ses ombres, ses peurs, ses pesanteurs: le médecin abjecte, le régisseur brutal, le pasteur adepte de la torture psychologique, le baron distant...
Pour le reste, difficile de trouver de gros défauts au film: photo sublime, écriture réaliste et sobre, interprétation au cordeau, un palette de portraits saisissant de justesse... et même cette fin ouverte, qui respecte en tout point un postulat de départ prenant: très rares sont les mystères résolus dans un village. Le plus souvent, on en reste au niveau de la conjecture, de la rumeur, de la jalousie.
Un film presque parfait mais dont la superbe froideur formelle m'a néanmoins tenu à une continuelle et légère distance, me rendant incapable d'entrer totalement en empathie avec les habitants de cette bourgade austère.