Michael Haneke l'a dit lui-même : «Le Ruban Blanc est un film contre tous les extrémismes. »
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Et ici, l'illustration est faite de l'Allemagne à l'aube de la Première Guerre Mondiale, portant déjà en son sein les prémices du nazisme. Un village idyllique, où l'hiver enneigé laisse place à l'été fertile, où la rivière regorge de poissons, où les rues ensoleillées sont bordées d'herbe, cache derrière les portes closes l'origine du mal. Et le mal commence à s'exprimer ouvertement , tandis que des agressions de plus en plus violentes sont perpétrées.
Il n'y a pas de coupable, la question n'est pas là ; le coupable est à la fois tout le monde et personne. La religion culpabilisante, l'éducation tellement stricte qu'elle pousse les enfants traumatisés à la psychose, l'aristocratie complice bien qu'incapable de comprendre la portée du mal. Le crime est commis sans que le coupable soit découvert, le crime est tout simplement, il blesse et propage un malaise.
La voix off elle-même, éraillée et affaiblie du vieil l'instituteur regroupant ses souvenirs d'avant-guerre, met en avant l'incompréhension du mal, la submersion de tous dans le malaise. Forte de son expérience, la voix-off permet d'exprimer non pas le regret douloureux, mais l'amertume. Car l'instituteur était en relation avec chacun des protagonistes. Il a saisi la teneur du mal, mais n'a pas su l'empêcher, il n'a pas pu enrayer le mécanisme qui lentement se mettait en place. La douleur sourde de l'instituteur est celle de ceux qui ont assisté à l'horreur.
Le génie de Haneke est d'apporter un contraste simple mais efficace entre les images en noir et blanc qui mettent en avant la beauté brute des lieux, et l'absence de musique, qui permet à la brutalité des paroles de résonner d'autant plus. C'est à la fois splendide et terrifiant, et peu à peu le malaise nous gagne.
Seuls restent finalement les enfants de la génération suivante, qui tels Sigi et le cadet du pasteur, innocents et en marge de cette violence, seront certainement les victimes de leurs aînés... Finalement, les prémices de l'horreur décelée parmi les personnages, le sentiment d'inéluctabilité dont chaque scène est empreinte, le talent de Haneke méritaient amplement une Palme d'Or.