Dans le genre policier et néo-noir, Jean-Pierre Melville (1917-1973) est le réalisateur français le plus influent dont la maestria est reconnue jusqu’aux Etats-Unis et en Asie. Grande source d’inspiration devenue universelle pour les cinéastes tels que Quentin Tarantino et Michael Mann, on peut aussi citer "The Killer" de John Woo et "Ghost Dog" de Jim Jarmusch qui reprennent tous les deux les thématiques du SAMOURAÏ. Jean-Pierre Melville influence mais il a bien évidemment été inspiré par le cinéma de Kurosawa et de manière plus marquée par celui, américain, des années 40 et 50.
Ce policier est surtout réputé pour sa mise en scène et son montage, on trouve dans le monde de Melville des criminels idéalisés qui n’existent que par leurs actes, toujours commis avec classe. Sa direction d’acteurs est toujours d’une précision chirurgicale et ses films reposent bien évidemment aussi sur la performance de ses interprètes. Sur les treize films qu’il réalisera, Jean-Pierre Melville saura toujours s’entourer des meilleurs acteurs de l’époque que ce soit Jean-Paul Belmondo, Lino Ventura, Yves Montand ou bien sûr Alain Delon qui est ici, comme le plus souvent à cette période, magistral.
Le premier plan, fixe, est déjà d’une rare perfection. Ensuite, pendant dix minutes sans dialogue, Jef revêt son manteau, puis, col remonté, visage enfoncé, il place son mythique chapeau sur sa tête. Mains dans les poches, il est prêt à exécuter son contrat que seule la belle musique de François De Roubaix accompagne. Le personnage est absorbant, tout est méticuleux, pur, onirique et d’une incroyable sophistication.
LE SAMOURAÏ… La solitude et l’inéluctabilité de la mort sont bien présents car c’est bien de ça dont il s’agit : la mort. Non celle des exécutés, mais de leur exécutant. Oui, Jeff est pris au piège, dans sa chambre, son corps, par l’intrigue, par la police, les gangsters, par Paris, les ombres, les longs couloirs, par la boucle du temps qui l’oblige à revenir encore et encore au même point. Il est en enfer et la seule façon de s’en sortir est son auto-extinction. Il le sait dès qu’il croisera la mort sous les traits de Valérie, la pianiste, interprétée par Cathy Rosier alors seulement âgée de 22 ans.
Au cinéma le plus important ce n’est pas ce que l’on raconte, mais comment on le raconte et nul doute que Jean-Pierre Melville est un des Maîtres de la narration. Visuelle et silencieuse. Somptueuse.