Comment ne pas être nostalgique de cette période bénie où le cinéma populaire savait s'adresser aux jeunes sans (trop) les prendre pour des mange merde, où l'on osait procurer du frisson non édulcoré, où le souffle épique savait souffler et emporter le spectateur, sans distinction d'âge ?
C'est certainement en partie cette nostalgie qui explique mon indulgence vis-à-vis de ce film plein de défauts.
Pourtant, pendant une quarantaine de minutes, on frôle le sans faute, et Levinson-Spielberg réussissent là où se sont vautrés successivement les adaptateurs de Rowling à l'écran. Car on baigne dans une ambiance qui aurait dû habiter Harry Potter, si la mise en image des romans avait été autre chose qu'un désastre plus ou moins contenu suivant les épisodes. Odeur de vieille pierre, de mystère, d'Angleterre plus ou moins Victorienne, il ne faut pas plus de quelques minutes pour que la magie opère. D'autant que, si Watson est difficilement supportable, Holmes par contre est tout en justesse, malgré quelques faux pas au cours du métrage, qu'on lui pardonnera sans peine.
Mais au bout de quarante minutes, après une piste suivie en pleine nuit, illustrée par des images magnifiques, on tombe sur une ridicule pyramide en bois, et le ton bascule.
Et là, il faut faire un choix : va-t-on accepter cette resucée bien cheap d'Indiana Jones et le Temple Maudit, au prix de cette ambiance qui nous avait tant séduit, ou va-t-on rejeter le film en bloc ?
Personnellement, j'ai oscillé entre les deux positions, d'autant plus qu'une fois le voile d'émerveillement levé, la magie partiellement brisée, on est confronté à un autre problème récurrent lorsqu'un scénario met en scène un personnage de génie : généralement, le scénariste ne fait pas le poids, n'a pas ne serait-ce qu'à l'état de trace l'intelligence nécessaire pour donner vie à un personnage de cette pointure, et l'on se retrouve avec des énigmes en forme de jeux de pistes cousus de fil blanc, des indices sous forme de Deus Ex Machina, des réflexions qui brassent du vent.
Conan Doyle avait fait Holmes à la mesure de son propre intellect (et ego). Et ici, le bât blesse. Néanmoins, le fait que ce film s'adresse à un jeune public pourra expliquer le coté "facile" des énigmes, leur dimension ludique, mais pas l'excuser complètement.


Reste que, ne serait-ce que pour son début, le film est une réussite, et si l'on accepte la présence d'un faux Molah Ram pas du tout flippant, une clin d'oeil tellement appuyé à ET qu'il en devient presque grossier, une citation édulcorée du second volet d'Indiana Jones, entre autres emprunts éhontés, ainsi qu'un final partiellement gâché malgré son potentiel dramatique (et un Watson à baffer), il est vraiment possible de jouir de ce film, de ressentir le souflle épique des films d'aventure de notre enfance, et de se laisser emporter par des images particulièrement belles et chaleureuses qui sentent bon l'Angleterre telle qu'on peut la fantasmer pour peu qu'on ait une âme romantique et un amour sans borne pour la grisaille hivernale et la chaleur apaisante des flammes d'un âtre fumant.


Par contre, si vous n'êtes pas d'humeur indulgente, vous risquez de vivre une transposition amère de la scène de la madeleine de Proust : une première bouchée qui vous transporte en enfance, qui vous fait rêver, une seconde moins efficace, où le trip nostalgique ne suffit pas à cacher un arrière goût un peu grossier, puis au fur et à mesure que se cumulent les détails qui ébranle la magie de la nostalgie et rendent de plus en plus visible les facilités de l'ensemble, les mécaniques grossières qui sous-tendent l'édifice, l'écoeurement prend le dessus et vient même souiller et annuler l'émerveillement du début.
Soyez prévenus, soit ça passe, soit ça casse!

toma_uberwenig
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le 6 sept. 2013

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toma Uberwenig

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