Il fut un temps où je ne connaissais du Seigneur des Anneaux que l'adaptation cinématographique de Peter Jackson, je ne crois pas dire de bêtises si je déclare que je ne savais même pas qu'à la base c'était un roman. Et puis, on a tous appris qu'outre la vision de Peter Jackson, il y avait eu, en 1978, celle de Ralph Bakshi, qui donnera naissance quelques années plus tard à Tygra, la glace et le feu - après, il est peut-être plus logique de dire que ce film est une vision de Peter S. Beagle (le papa de La Dernière Licorne) étant donné qu'il était au scénario. De ce fait, j'avais entendu durant des années à quel point ce film était... particulier, jusqu'à ce que le Youtuber Benzaie ne sorte dans sa chronique "Hard Corner" une review du film, achevant mon envie d'être peu intéressé par cette adaptation. Ainsi, j'ai rattrapé mon retard et ai honoré mon amour pour les œuvres de J.R.R. Tolkien en visionnant ce fameux film. Voilà ce que j'en ai pensé !
Rien de bien nouveau sous le soleil : nous suivons le voyage de l'Anneau unique dans les mains du hobbit Frodon Sacquet (malgré la nouvelle nomenclature, je ne me sens pas prêt à abandonner celle donnée par Francis Ledoux), épaulé par huit membres d'une communauté, dans l'espoir d'être détruit dans les flammes qui l'ont vu naître.
Pas plus de spoil, comme à mon habitude ; du moins, rien que l'on ne sait déjà !
Pour l'histoire, car il faut bien un commencement, force est de constater qu'à l'instar des adaptations de Peter Jackson, nous sommes plutôt fidèle au roman originel (même si, question fidélité, je demeure assez ouvert) en omettant néanmoins quelques passages qui ont fait le charme de la première partie du voyage de Frodon (la rencontre avec Tom Bombadil...). Cependant, tout n'est pas rose, loin de là et je suis, indirectement, obligé d'en faire mention car j'ai vu, j'ai grandi avec les œuvres de Peter Jackson et surtout, j'ai lu le roman : le film de Ralph Bakshi est affreusement rapide ! En deux heures, il doit adapter La Communauté de l'Anneau et Les Deux Tours et concrètement, on n'a pas de temps à perdre. Le temps défile à toute allure, ce qui a un impact juste énorme sur le déroulé de l'intrigue, tout est réduit à quelques phrases explicatives concernant le pourquoi du scénario et c'est tout. Ce qui donne ce sentiment d'insatisfaction qui nous suit du début jusqu'à la fin du film. Rien ne prend vraiment le temps de respirer ou de se poser. Tout s'enchaine à l'excès en gardant, tant bien que mal, une certaine cohérence plus que fragile. Un manque de temps qui va tout bonnement ruiner certains passages à l'image de la bataille du Gouffre de Helm qui est bouclée en dix minutes montre en mains. A contrario, certaines scènes sont allongées sans que l'on sache vraiment pourquoi étant donné qu'il ne s'y passe absolument rien à l'image du sauvetage involontaire du Merry et Pippin par les cavaliers du Rohan. C'est donc un jonglage laborieux mais logique dans son erreur que propose ce film dans la narration de son histoire, passant de séquences pourtant cruciales évincées en trois secondes et appuyant des moments facultatifs sur de bonnes grosses minutes. Ce n'est pas le pire point mais force est de constater qu'il ne laisse pas de très bonnes impressions dans sa volonté de nous faire adhérer de manière convenable à l'intrigue contée.
Pour les personnages, il n'y a pas grand chose à dire... Très sincèrement, on peut "s'offusquer" de contempler des versions quelque peu discutables de certains personnages (Boromir avec un casque à cornes, Aragorn sans pantalon...) mais très franchement, c'est un argument déplacé. Dans l'ensemble, les acteurs (le film a usé de la technique dite de la rotoscopie = on filme des acteurs et on les peint/dessine par la suite) jouent, tout simplement. Après, on peut souligner que le jeu n'est pas égal entre certains personnages principaux en surjeu et d'autres, plus secondaires - voire tertiaires dans la mesure où il s'agit de figurants - qui ne jouent pas du tout. Pas mal de gestes, déplacements... peuvent interroger sans que cela n'est un réel impact négatif sur le visionnage. Pour le doublage, c'est à peu près la même chose : ce n'est pas mauvais en soi mais certaines intonations peuvent laisser dubitatif, sans forcément rendre la visionnage désagréable. Déclarons-nous que cela amuse plus que cela ne déprime. Le point négatif néanmoins est bien l'esthétique donnée aux personnages, la plupart sont bizarres quand ils ne sont pas tout simplement affreux. Ce qui explique le caractère moqueur que l'on peut avoir en visionnant le film.
Concernant les effets spéciaux, c'est là où ça se gâte... Même si... Enfin, la grande "nouveauté" est l'utilisation de la fameuse rotoscopie pour matérialiser les personnages. Et si dans l'ensemble, bon, ça a l'air pas trop mal, force est de constater qu'à de nombreux endroits et moments, le résultat est assez limite avec cette sensation de n'être pas allé jusqu'au bout. Ce qui offre plusieurs scènes plutôt difficile à regarder étant donné que le côté peint des acteurs est inachevé. Alors, en un sens, ça donne un certain cachet graphique au film mais dans l'immédiat, lorsque l'on voit cela, ça donne plus l'envie de ne pas regarder la suite. De plus, si on peut se dire que pour les personnages principaux, ce principe demeure pardonnable, ce moyen de réalisation prouve, avec les antagonistes mineurs (orcs et autres créatures malfaisantes), que le résultat est affreux. On n'y croit pas une seconde : le rendu final est nul mais en plus de ça, les yeux et les dents ont été (mal) rajouté par dessus, ce qui achève une volonté de réalisme et confirme du grotesque ; chose qui se ressent davantage avec ce que l'on propose pour le Balrog. Un autre point qui peut déranger, c'est le lien entre certaines scènes, voire plans où l'on accueille différents moyens de capture : on a ce côté dessin avant que ne surgisse un côté film de plans réels (généralement ceux d'un ciel nuageux), ce qui casse également la logique et la manière que le spectateur a de concevoir le film. Heureusement, il y a un point positif à tout ça, bien que assez mineur : les dessins sont, pour la plupart, de bonnes factures et offrent des visions intéressantes des différents lieux que l'on découvrent. Mais ça demeure bien mince.
Pour les combats, on mixe entre des séquences ennuyeuses alimentées par des ralentis franchement pas utiles et servant plus à ridiculiser les héros et des scènes plus que moyennes. On regrettera quelques séquences répétées, donnant l'illusion qu'en plus de ne pas avoir de temps pour raconter une histoire "convenable", les réalisateurs n'ont pas eu le temps de tourner d'autres séquences.
De ce fait, pour les lieux et les décors, c'est un point qui demeure assez positif dans l'ensemble avec des croquis intéressants bien que les couleurs de certains plans soient bien plus mauvais.
En ce qui concerne les musiques, je dois avouer n'avoir eu de sympathie pour aucune d'entre elles. Une impression de décalage total mais pas dans le bon sens...
Le Seigneur des Anneaux souffre de pas mal de problèmes malgré des idées foisonnantes dont certaines m'ont charmées à l'instar de l'entrainement de Gimli par Legolas à l'arc. Le film prouve qu'il a des idées mais il faut croire qu'elles n'ont pas toutes été retenues. Le résultat final est bien trop moyen pour être justement apprécié et ce, malgré des volontés de bien faire à n'en pas douter. Le problème principal réside dans l'utilisation de la rotoscopie qui, si elle a fait ses preuves dans Tygra, la glace et le feu, ne les fait pas ici par manque de temps pour finaliser la chose. Cependant, Peter Jackson a déclaré s'être inspiré de cette création pour son adaptation et, bizarrement, cela se ressent à présent que je connais ce film : de nombreuses scènes, absentes des livres, mais présentes dans l’œuvre de Ralph Bakshi se retrouvent chez Jackson, un hommage sympathique pour un film qui aura tenter de donner des couleurs à l'univers de la Terre du Milieu sans parvenir à une conclusion satisfaisante. Je recommande, avec beaucoup de précaution toutefois, ce film qui nous donne une vision différente - dans les grandes lignes - de l’œuvre de Tolkien. Alors, contrairement à mon titre, ce film n'est pas vraiment un échec mais il a cependant bien permis à une production meilleure, quelque part, un succès à la hauteur.
Et n'oubliez pas que la Fantasy nous appartient !