Il est patent que certaines oeuvres littéraires sont, pour ainsi dire probablement impossible à adapter au cinéma. Et il est fort probable également que Le Seigneur Des Anneaux, cette oeuvre gigantesque, entre dans cette catégorie.
Difficile d'allier l'idée d'un rythme soutenu des phases actives des personnages principaux (quêtes, fuites, combats) et tout le merveilleux inhérent à l'univers (la découverte du monde des Elfes, de la beauté infernale de la Moria, de la froideur du Gouffre de Helm, les Ents).
Bakshi, visiblement soumis à des conditions matérielles désastreuses (l'éternel débat: Faut-il quand même y aller avec trois francs six sous ou remettre à plus tard son ambition et donc, au final, ne rien faire mais au moins le projet en soi est protégé ?) détruit complètement le charme avec ce style graphique. Entre les silhouettes d'orcs immobiles et répétitives, les décalages graphiques qui vous font sortir du film, les têtes aux yeux hallucinés, impossible de ne pas se retenir de pouffer de rire, ce qui vous fait immanquablement sortir du film.
La vision de l'Ent, sorte de carotte malformée, achève bien le spectateur et ce qu'il reste de dignité à la direction artistique.
L'histoire par ailleurs est vite, très vite expédiée, ce qui est il faut bien le dire, un problème inhérent aux livres, qui alterne voyages, rencontres merveilleuses et batailles, chacun et chacune ayant son tempo et son ambiance, qui fait vivre le monde et donne envie de le sauver. Et ce tempo n'est pas forcément adaptable dans le cadre d'un film qui demande plus de régularité dans son rythme. Bakshi fait donc le choix d'aller vite, limité par son budget. On notera que Peter Jackson ne fera pas mieux, avec le discours pseudo patriotique qu'il sert aux Ents pour les convaincre de participer à la bataille (alors que dans le bouquin ils le décident d'eux-mêmes - les attentats du 11 septembre étant passés par là..)
Ici, les décors sont bien trop vides et mal faits et limite les voir dévastés par Sauron (ou Saroumane, si vous le préférez à l'autre) serait presque un mal pour un bien.
Reste un pauvre cheval qui remplit bien son rôle à l'entrée de la Moria donnant le temps aux héros d'entrer dans le Moria malgré son gardien vraiment mollasson (il réagit à peine à la présence des intrus quand Frodon est au bord de l'eau, alors que ça fait un moment que Gandalf essaie d'ouvrir la porte), et des Nazguls qui font Nazguls alors qu'ils souffrent tout autant de la direction artistique que les autres.
Ce n'est pas grand chose mais bon, y avait du fromage et du coca sur la table devant la télévision alors...