• Je ne croyais pas que ça finirait de cette manière.

  • Finir ? Non, le voyage ne s’achève pas ici. La mort n’est qu’un autre chemin qu’il nous faut tous prendre. Le rideau de pluie grisâtre de ce monde s’ouvrira et tous sera brillant comme l’argent. Alors vous les verrez…

  • Quoi Gandalf ? Voir quoi ?

  • Les rivages blancs et au delà, la lointaine contrée verdoyante sous un fugace levé de soleil.

  • Alors… ça ne va pas si mal ?

  • Non, en effet.



Le Seigneur des anneaux : le retour du roi est une oeuvre symbolique car elle conclut la saga culte de Tolkien sous la réalisation de Peter Jackson. Il y a eu tellement de choses positives qui ont été dites et plusieurs fois sur ce film, que je vais exceptionnellement me focaliser sur les points négatifs de cette oeuvre que je trouve nombreux. Cela aura pour but d'amener un peu de réflexion sur ce final que je trouve à la hauteur de la saga d'un point de vue spectacle et dramatique, mais clairement inférieur dans l'écriture. N'ayez crainte, je commence par le positif.


La bataille ultime pour la Terre du Milieu commence, et s'achève avec brio. Après un spectacle impressionnant de plus de trois heures on ressort essoré et fatigué ( comme si on avait participé à cette titanesque bataille) d'une telle expérience. Un spectacle à couper le feu avec des effets spéciaux toujours plus incroyables dans un récit hypnotisant, évocateur et inspirant. Rarement dans le monde du cinéma on se retrouve autant absorbé dans une épopée d'aventure aussi stupéfiante. On retrouve avec un plaisir non dissimulé l'ensemble des comédiens qui offrent des performances d'ensemble toujours aussi convaincantes. Le rythme est sublimé par les ambiances oniriques qui évoluent sans effort dans un univers toujours aussi incroyable, pourvu de sublime beauté et d'émerveillement, à travers des paysages toujours autant majestueux, le tout contrasté avec génie par la composition impactant d'Howard Shore. Une oeuvre riche en tension dramatique, parfaitement rythmée, proposant une belle palette émotionnelle surtout autour des relations entre les différents personnages.


Les batailles ( surtout celle des Champs du Pelennor) sont mis en scène dans des proportions colossales et stupéfiantes. Tout du long de la bataille on est accroché à son siège, on en prend plein les yeux. Des yeux qui du début à la fin sont mis à rude épreuve, entre les batailles épiques et les différents liens bouleversants, nous offrant un final grandiose dont on garde un grand et long sourire après le générique de fin.


L'intrigue se déplace intelligemment entre les différents segments de l'histoire (sauf sur quelques points très grossiers que j'aborderai dans la partie négative) illustrée par les différents héros. On retrouve en premier plan la camaraderie entre Frodon Sacquet le détenteur de l'anneau unique et Sam Gamegie son fidèle compagnon qui clairement est la vedette du film. L'aventure de Sam et de Frodon, accompagné du perfide Gollum dans le royaume dévasté du Mordor est de loin la plus captivante et saisissante de tout le récit. Sam Gamegie se révèle totalement, prenant beaucoup plus de place dans cette aventure. Il est de loin mon personnage favori de ce troisième opus.


Aragorn, l'héritier du trône du Gondor accompagné de Gandalf le Blanc (promis cette fois-ci je ne ferai pas de jeu de mot débile) amènent une présence dominante au récit, préparant la grande guerre qui s'annonce chacun de leurs côtés, réunissant par la même l'ensemble des personnages divisés. Une troisième intrigue se dévoile, celle de l'elfe Arwen fille du seigneur d'Elrond, amenant quelques péripéties amoureuses, surtout maintenant qu'elle a une adversaire potentielle pour l'amour de son bien-aimé Roi Aragorn, " Eowyn " (attention le crêpage de chignon). À noter l'apparition de nouveaux personnages, comme l'Intendant du Gondor " Denethor ", père de Boromir et Faramir, que je trouve bien moins subtil que dans le livre qui n'en fait pas qu'un fou, et surtout un tueur d'enfants qui envoie son propre fils ( Faramir) à la mort pour reconquérir les frontières. Tout ce beau monde trouvera une conclusion à la hauteur du récit. Il n'y a que les vilains qui peuvent regretter leur mauvais traitement. Parfait pour faire la transition, vers...



...les points négatifs : ##



Au cours des deux premiers opus, Le Seigneur des anneaux nous a habitué à beaucoup de finesse dans l'écriture, ainsi que dans le développement des personnages, et c'est précisément ce qui fait défaut au Retour du roi. Commençons par l'écriture. Le récit possède non pas " une ", mais " trois " grosses ficelles scénaristiques rouge vif ( garder bien ceci en tête). L’inventivité et l’originalité d’un scénariste/auteur ne se mesurent pas qu'à sa capacité à inventer de nouvelles histoires mais aussi à les raconter, et on peut dire que Jackson a échoué à plusieurs reprises sur ce troisième opus.


L'ultime guerre des Champs du Pelennor, va bientôt commencer. On le sait les hommes sont voués à perdre cette guerre contre Sauron, c'est pourquoi les elfes quittent la Terre du Milieu car ils la savent condamner. Jusque-là rien à redire, cette guerre perdue d'avance amène beaucoup de tension au récit. On comprend bien qu'il va falloir une chose que les elfes et Sauron n'ont pas prévue pour remporter la bataille. C'est ainsi qu'intervient la fameuse armée des Morts. L'idée ne me dérange pas, c'est au contraire une bonne manière de renverser au dernier moment la situation. Le problème vient de son exécution, qui atteint l'amateurisme et la facilité déconcertante tant c'est très gros. Souvenez-vous des trois grosses ficelles scénaristiques, eh bien on les retrouve en une seule séquence fait pour justifier l'arrivée de l'armée des morts dans la bataille qui sera à l'origine de la victoire. " L'élément-clé de l'intrigue ".


- Roi Théoden : La guerre va bientôt avoir lieu, et nous ne sommes pas suffisamment nombreux pour la remporter. Nous sommes condamnés, la Terre du Milieu est vouée à disparaître. Seul un miracle pourrait nous sortir de cette situation.
- Aragorn : Qu'est-ce que c'est que ce passage étroit s'enfonçant profondément dans la montagne?
- Légolas : C'est là-bas que réside l'armée des morts, un lieu maudit.
- Aragorn : Ah bon une armée des morts. Quelle chance mes amis d'avoir dressé le camp de base pile poil au bon endroit, pour aller chercher cette armée des morts dont on aurait cruellement besoin. (première ficelle)
- Légolas : Ouaip, mais le problème c'est que les morts n'obéissent à personne. Seul un héritier d'Isildur pourrait lever la malédiction qui pèse sur eux, et du coup les faires obéir.
- Aragorn : Mais cela tombe super bien ! Je suis justement un héritier d'Isildur. (seconde ficelle)
- Légolas : Oui mais le problème, c'est qu'il faudrait une preuve de ton rang, qui se trouve être une arme unique capable d'ailleurs de toucher l'armée des morts. L'épée d'Isildur.
- Aragorn : Crotte de gobelin ! L'épée de mon ancêtre est brisée, et en plus elle se trouve très loin d'ici à Fondcombe. Tout est finis.
- Gimli : Aragorn tu as de la visite. Tu devineras jamais qui vient comme par hasard d'arriver ?
- Seigneur Elrond : Bonjour fils adoptif, qui pour me remercier n'a rien trouvé de mieux que d'épouser ma fille et par conséquent ta demi-soeur. J'apporte un présent pour toi.
- Aragorn : Un cadeau ? Merci il ne fallait pas papou. Mais c'est...
- Seigneur Elrond : Oui c'est l'épée d'Isildur, je l'ai fait réparer et j'ai décidé de te l'amener. (troisième ficelle)
- Roi Théoden : Le miracle a eu lieu. Alléluia, proclamez que le Seigneur est bon !
- Aragorn : J'avoue que là c'est vraiment du bol, moi-même j'en reviens pas.
- Gimli : Par la barbe de Merlin, je vous avais dit que la barbe de nain cela portait chance. Encore un qui n'a pas regardé la saga Bilbo.


Voilà donc comment se résume le point crucial de la trilogie, qui fera basculer la victoire contre la fameuse armée de Sauron (dont on nous parle depuis le début comme étant impossible à vaincre). Beaucoup de chance et d'heureux hasard. Je ne comprends pas ce choix de la part de Jackson, c'est tellement gros que cela en est ridicule, surtout que dans le livre Tolkien ne le pose absolument pas ainsi. Le contraste d'écriture entre les deux premiers opus et celui-ci est incompréhensible. De finesse on passe à grossièreté. L'armée des morts est le point crucial de la victoire durant la bataille des Champs du Pelennor, et son arrivée n'est réglée qu'en une seule séquence, alors que justement cela aurait dû être au contraire très bien posé. Mais bon, je suppose que peu importe tant qu'on a une grosse bataille à la fin, on s'en fiche.


Maintenant l'autre problème : " le développement des personnages ". Certains personnages souffrent de réels problèmes de développement, je passerais sur le traitement de Gimli et Légolas qui n'ont à eux deux que 20-30 minutes d'apparition à l'écran ( dommage pour les fans du nain et de l'elfe ). Parlons de Saroumane le mage déchu.


Saroumane est l'antagoniste physique principal des deux premiers opus. Il prend une telle place qu'il relègue Sauron au second plan. C'est un méchant charismatique et puissant qui s'est livré à plusieurs confrontations spectaculaires contre Gandalf. L'opus d'avant terminait sur la séquence des Ents attaquant et détruisant Isengard, avec en son centre la grande tour d'Orthanc, où se trouve Saroumane piégé. Le retour du roi reprend à ce moment-là. Gandalf, Aragorn et le reste de la troupe arrive devant la tour du mage. Ils sont reçus par Peregrin Touque, Meriadoc Brandebouc et Sylvebarbe, expliquant la situation, dont le fait que Saroumane est prisonnier dans la Tour.


La tension est à son comble, on se dit : " ça y est Gandalf va dire aux troupes de ne pas intervenir car Saroumane est trop puissant, et qu'il va s'en occuper lui-même. Il va rentrer dans la tour et va faire un duel antologique contre Saroumane... et... et... WTF ! " Eh ben non, il n'en est rien : " on laisse Saroumane prisonnier de la Tour, il est vaincu ", voici les mots de Gandalf. Dans un premier temps je suis resté choqué, puis dans un second temps je me suis dit : " Tout ça pour ça ! Mais à quel moment tu as cru que Saroumane enfermé dans sa tour ne représentait aucun danger. Le gars a tout du long fait des attaques surpuissantes depuis son repère, cela n'a aucune espèce de logique. En bref, on nous prive ridiculement d'un final qui aurait pu être très fort ".


Finalement, sort la version longue qui va un peu rétablir le traitement catastrophique fait sur la fin de Saroumane. Seulement attention, il ne faut pas s'attendre à grand chose. Saroumane est one shot par Gandalf, se faisant juste après poignarder dans le dos par Grima langue de serpent, comme dans le livre. Dans le livre Saroumane prend sa revanche en asservissant la Comté avec des Hommes de Dûn (après la défaite au gouffre d'Helm), c'est là qu'il sera tué par Grima, qui sera lui-même tué par des flèches tirées par les hobbits.


Quitte à ne pas respecter le livre à la lettre (ce que je comprends), pourquoi ne pas avoir fait une fin appropriée au spectacle autour de la défaite de Saroumane ? C'est gâché toute l'attente et le potentiel autour de la confrontation contre ce personnage. De plus, où dans le film on voit une seule fois Grima langue de serpent être malmené par Saroumane ? Dans le livre on comprend pourquoi il tue celui-ci, mais dans le film jamais on ne nous montre de la haine vis-à-vis des deux hommes, c'est même l'inverse. Grima est totalement à la solde de son maître et du coup on se demande pourquoi est-ce qu'il a tué Saroumane. Encore un personnage mal écrit, c'est pourquoi la version longue ne rend pas forcément grace à certaines scènes.


Ce processus de personnages est un problème récurrent dans le retour du roi, comme également avec le Nazgûl Roi-sorcier d'Angmar (que je vais appeler "Angmar" durant cette critique pour faire plus court), qu'on nous présente au dernier moment en tant que plus puissant et chef des Nazgûl, qui est tué aussitôt dans un combat grotesque par Eowyn. Angmar est charismatique, il a de l'allure, on comprend que durant la bataille des Champs du Pelennor il est sensé incarner " la " force et chef maléfique à abattre, remplaçant le vide laissé par Saroumane. Sauf que le gars n'arrive pas à être une menace durable ni crédible, car il disparaît aussi vite qu'il est arrivé. Il aurait dû être posé bien avant dans la trilogie (en tant que chef Nazgûl surpuissant avec sa couronne) pour être perçu comme une menace durable, mais non il est semblable à un feu de paille. Un personnage au potentiel immense grandement gâché.


La version longue lui rendra un peu plus hommage, notamment durant sa confrontation contre Gandalf. Hélas après une forte impression laissant un Gandalf vaincu par le Nazgûl Angmar, celui-ci se fait tuer ridiculement dans un duel que je trouve grotesque. Le fait qu'il soit tué par Eowyn aidée de Merry ne me dérange absolument pas, seulement ce n'est clairement pas à la hauteur du défi.
Le problème de Peter Jackson " pour ce film ", c'est qu'il fait de l'anti-épique avec ses méchants charismatiques dans un film au contenu épique. Va chercher à comprendre. Je vois surtout beaucoup de potentiel jeté à la poubelle. C'est fort dommage. Heureusement cela ne sera pas suffisant pour gâcher le Retour du roi.


CONCLUSION :


Le seigneur des anneaux : le retour du roi, inventé par Tolkien et réalisé par Peter Jackson propose une superbe conclusion, non pas dénuée de défauts. Tout du long de la saga on assiste à une histoire extraordinaire sur les efforts humains, la force d'unifier les races, les chutes du pouvoir et le triomphe de l'esprit. Un film nous racontant une histoire incroyable, malheureusement pas si bien racontée dans ce troisième opus, mais qui ne gâchera pas l'expérience hors normes d'une telle odyssée. Au final j'en retiens des personnages riches et attachants, des monstres effrayants, les crie obsédant et flippant des Nazgûl spectres de l'anneau, la musique emblématique d'Howard Shore, et enfin et surtout son univers large et profond d'une beauté à couper le souffle. Bravo Peter Jackson pour avoir réussi à faire l'impossible en adaptant cette oeuvre mythique.


L'aventure s'achève avec les honneurs, même si...



La maison est derrière, le monde est devant,
Et il y a bien des chemins à parcourir
À travers les ombres jusqu’à l’orée de la nuit,
Jusqu’à ce que les étoiles soient toutes allumées.
Alors, monde derrière et maison devant,
Nous reviendrons vers la maison et le lit.
Brume et crépuscule, nuage et ombre,
S’évanouiront ! S’évanouiront !
Feu et lampe, et viande et pain,
Et puis au lit ! Et puis au lit.


B_Jérémy
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le 9 juil. 2020

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