Bien entendu, il faut à tout prix éviter de comparer ce que l'on ressent devant les trois (parfois un tantinet fastidieuses) heures et demi de la version longue du film de Peter Jackson, avec le souvenir absolument enchanté de la lecture des "Deux Tours" de Tolkien, soit la meilleure partie du "Seigneur des Anneaux". Car on risquerait alors d'avoir à admettre qu'il y a un gouffre (de Helm...) qui sépare les deux… avant de convenir, dans un sursaut d'honnêteté, qu'il ne s'agit là de rien d'autre que le gouffre que l'on constate à chaque adaptation d'un livre "important" : entre la force de notre imagination et la trivialité des images, même boostées par les effets spéciaux contemporains, il n'y a tout simplement pas photo !


Alors, ne pointons plus, comme nous l'avions fait à la sortie du film, l'échec de l'approche de Peter Jackson, sans doute trop fidèle à son matériau de base pour laisser de purs moments de cinéma advenir, trop préoccupé par les défis techniques à relever. Réjouissons-nous plutôt de la superbe démesure de nombre de grandes scènes titanesques - la bataille du gouffre de Helm, le déferlement des Ents sur Isengard -, de l'émotion parfois bouleversante qui naît des multiples drames humains causés par la guerre et ses horreurs, de la complexité de personnages qui gardent suffisamment de la richesse du livre pour échapper aux stéréotypes. Admirons la remarquable interprétation de Gollum par un Andy Serkis qui semble transcender son personnage digital. Et n'oublions surtout jamais que Tolkien, lorsqu'il célébrait dans son livre l'humble résilience et la bravoure obstinée des petites gens emportés dans la tourmente d'une guerre mondiale contre les forces du Mal, rendait son œuvre inestimable dans le contexte de la lutte contre le nazisme et le fascisme : le véritable héros du "Seigneur des Anneaux" est Sam Gamegie - excellent Sean Astin - et Peter Jackson l'a bien compris.


[Critique réécrite en 2020, suite à un nouveau visionnage du film - le cinquième depuis 2002 et le second en version longue, supérieure à la version sortie originellement en salles - en compagnie de ma fille la plus jeune, qui découvre la magie de l'univers tolkienien...]

EricDebarnot
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les films aux décors les plus impressionnants

Créée

le 30 sept. 2013

Critique lue 574 fois

11 j'aime

5 commentaires

Eric BBYoda

Écrit par

Critique lue 574 fois

11
5

D'autres avis sur Le Seigneur des Anneaux - Les Deux Tours

Le Seigneur des Anneaux - Les Deux Tours
guyness
9

La mère des batailles.

Je vais commencer fort: je préfère les films aux livres. Je sais, c'est sacrilège. Pourtant, en écrivant ça, j'ai bien conscience que le livre a marqué a sa manière l'histoire de la littérature en...

le 1 mars 2011

104 j'aime

20

Le Seigneur des Anneaux - Les Deux Tours
Torpenn
6

Le zéro de conduite de Viggo

Suite de ma redécouverte trépidante de la trilogie de Peter Jackson en version longue avec le deuxième opus, le plus faible, particulièrement charcuté en version cinéma et qui gagne nettement à...

le 11 mars 2013

83 j'aime

20

Du même critique

Les Misérables
EricDebarnot
7

Lâcheté et mensonges

Ce commentaire n'a pas pour ambition de juger des qualités cinématographiques du film de Ladj Ly, qui sont loin d'être négligeables : même si l'on peut tiquer devant un certain goût pour le...

le 29 nov. 2019

205 j'aime

152

1917
EricDebarnot
5

Le travelling de Kapo (slight return), et autres considérations...

Il y a longtemps que les questions morales liées à la pratique de l'Art Cinématographique, chères à Bazin ou à Rivette, ont été passées par pertes et profits par l'industrie du divertissement qui...

le 15 janv. 2020

191 j'aime

115

Je veux juste en finir
EricDebarnot
9

Scènes de la Vie Familiale

Cette chronique est basée sur ma propre interprétation du film de Charlie Kaufman, il est recommandé de ne pas la lire avant d'avoir vu le film, pour laisser à votre imagination et votre logique la...

le 15 sept. 2020

190 j'aime

25