Je n'avais pas encore lu la nouvelle de Vercors et n'ai toujours pas vu la version de Jean-Pierre Melville, mais je suis à peu près sûr que cela n'aurait en rien changé mon ressenti sur ce téléfilm. Il est d'ailleurs très étonnant de voir à quel point Pierre Boutron a su rester proche de l'auteur tout en enrichissant à plusieurs reprises le récit, si bien que ce « Silence de la mer » est une adaptation fidèle sans l'être réellement. Ensuite, j'ai été bluffé devant l'intensité qui se dégage très régulièrement de nombreuses scènes, notamment celles entre les trois protagonistes principaux, le malaise étant par ailleurs très subtilement exploité par le réalisateur, jouant avec intelligence du cadre et des décors pour nous déstabiliser de façon quasi-ininterrompue.
Il est alors aisé pour Boutron d'opérer à un renversement des valeurs que l'on voit pourtant arriver et fonctionnant à plein régime, la résistance du vieil homme et de sa nièce apparaissant alors bien vaine face à l'intelligence et à la culture de Werner von Ebrennac. Et quand en plus les personnages sont dessinés avec talent et profondeur, servis par d'excellents acteurs (si Michel Galabru est impeccable, Julie Delarme et surtout Thomas Jouannet sont magnifiques), il ne reste plus qu'à se précipiter sur cette œuvre poignante et inoubliable : une grande réussite.