Situé dans l'Amérique du Sud des années 1930, Le Souffle sauvage met en scène la résistance de quelques prospecteurs de pétrole face à une petite armée de bandits. D'un côté les gentils expatriés américains, Jeff Dawson (Gary Cooper) en tête, secondé par son associé Dutch (Ward Bond) et, plus tard, par son vieil ami Paco Conway (Anthony Quinn). De l'autre les méchants locaux, une horde nombreuse et surarmée emmenée par El Gavilan (Juan Garcia), qui rackette les exploitants de la région et incendie leurs puits en cas de refus. Au milieu de tout ça s'écrit l'histoire plus intime d'un triangle amoureux entre Marina (Barbara Stanwyck), l'ancienne petite amie de Dawson devenu l'épouse de Conway, toujours jalousement amoureuse du premier et pleine de mépris pour le second.
Traduction maladroite de l'anglais Blowing Wild, Le Souffle sauvage est un film très réussi au-delà de ce détail. Il est d'ailleurs étonnant, vu son casting de haut niveau, qu'il ne soit pas davantage connu. Gary Cooper y joue son rôle habituel de héros fatigué mais droit dans ses bottes, Barbara Stanwyck interprète comme elle sait si bien le faire une femme rongée par une jalousie possessive sur le point de tourner à la folie meurtrière, et Anthony Quinn campe avec aisance une grande gueule sympathique mais un peu lâche. La réalisation de l'Argentin Hugo Fregonese, qui signe là l'un des meilleurs films de sa carrière hollywoodienne, est travaillée, et met en valeur une belle photographie d'un noir et blanc lumineux.
À sa sortie, Le Souffle sauvage a apparemment été décrié pour ses fortes ressemblances avec d'autres films plus célèbres. Un an après Le Train sifflera trois fois, le parallèle est inévitable puisqu'on retrouve ici, outre le vieux Coop', une bande-son composée par Dimitri Tiomkin et un lancinant thème principal interprété par Frankie Laine. Évidemment, la (très réussie) séquence de convoyage de nitroglycérine ne manque pas de rappeler Le Salaire de la peur, sorti la même année. Enfin l'ambiance générale, les décors, la présentation des deux prospecteurs et certaines scènes de la première demi-heure semblent directement empruntés au Trésor de la Sierra Madre, sorti en 1948. Plagiat ou coïncidence, qu'importe : Le Souffle sauvage se suffit très bien à lui-même tel quel. Servi par la qualité de sa distribution et l'alternance des genres qu'il propose, du film d'aventure au film noir en passant par le western et le mélo, il offre un divertissement de très bonne qualité, où l'ennui n'a pas sa place.