Jean Epstein : un phare dans la tempête. Cinéaste de génie, alchimiste des éléments et de leurs innombrables mouvements le prodigieux fils prodigue de l'avant-garde du Septième Art accouche en 1948 d'un court métrage testamentaire d'un beauté morganatique sans précédent : Le Tempestaire, véritable chant du cygne pour son réalisateur. Un point d'orgue d'expérimentations en tous genres, redéfinissant à l'infini la notion de rythme et celle de la cinétique pure et dure : un poème mêlé d'écume et de vent, de ressac et de nuages brumeux. Un chef d'oeuvre d'hypnose.


Au même rang que Les travailleurs de la mer de Victor Hugo Le Tempestaire de Jean Epstein rejoint les grandes pièces artistiques concernant l'Océan et ses éléments, la fatalité chimique sous laquelle ploie inéluctablement l'homme, reléguant au second plan ses aspirations pour la conquête et l'exploration ; il s'agit bel et bien d'un authentique ananké des forces maritimes dans ce poème au goût prononcé pour le mysticisme et le légendaire, d'un petit bijou de cinéma plaçant très haut la puissance des images et celle du son.


Prenant la forme d'un conte Le Tempestaire n'est rien de moins qu'un paradigme de montage et de photo-cinégénie. Epstein y pense chacun de ses plans par et pour leur durée et chacun de ses raccords, jouant de ses réminiscences et de ses recompositions temporelles à la manière des attractions des travaux de Serge Eisenstein et de Dziga Vertov ; il honore également l'héritage des débuts du cinématographe, reprenant les célèbres trucs du cinéma de Georges Méliès pour mieux leur insuffler sa propre identité artistique. En résulte un objet passionnant à contempler et/ou à étudier, capable aussi bien de s'adresser aux esthètes qu'aux exégètes : c'est sublime.

stebbins
10
Écrit par

Créée

le 15 avr. 2020

Critique lue 225 fois

7 j'aime

stebbins

Écrit par

Critique lue 225 fois

7

D'autres avis sur Le Tempestaire

Le Tempestaire
stebbins
10

De mon globe d'eaux argentées...

Jean Epstein : un phare dans la tempête. Cinéaste de génie, alchimiste des éléments et de leurs innombrables mouvements le prodigieux fils prodigue de l'avant-garde du Septième Art accouche en 1948...

le 15 avr. 2020

7 j'aime

Le Tempestaire
Fritz_Langueur
8

Critique de Le Tempestaire par Fritz Langueur

Ce qui frappe d'abord les premières minutes, c'est le jeu des acteurs, très empreint du maniérisme des films muets. Mais très vite on se laisse gagner la force visuelle incroyable qu'Epstein apporte...

le 1 févr. 2015

7 j'aime

Le Tempestaire
Nio_Lynes
9

Ralentir le temps

Après la guerre, Jean Epstein ne tournera plus que deux oeuvres. Il est regrettable que la mort nous ait privé trop tôt du cinéaste car avec le recul, sans doute aurait-on pu avoir de nouvelles...

le 21 avr. 2018

3 j'aime

Du même critique

La Prisonnière du désert
stebbins
4

Retour au foyer

Précédé de sa réputation de grand classique du western américain La Prisonnière du désert m'a pourtant quasiment laissé de marbre voire pas mal agacé sur la longueur. Vanté par la critique et les...

le 21 août 2016

44 j'aime

9

Hold-Up
stebbins
1

Sicko-logique(s) : pansez unique !

Immense sentiment de paradoxe face à cet étrange objet médiatique prenant la forme d'un documentaire pullulant d'intervenants aux intentions et aux discours plus ou moins douteux et/ou fumeux... Sur...

le 14 nov. 2020

38 j'aime

55

Mascarade
stebbins
8

La baise des gens

Nice ou l'enfer du jeu de l'amour-propre et du narcissisme... Bedos troque ses bons mots tout en surface pour un cynisme inédit et totalement écoeurrant, livrant avec cette Mascarade son meilleur...

le 4 nov. 2022

35 j'aime

6