Pentes glorieuses
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le 1 déc. 2023
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Katell Quillévéré est une réalisatrice qui est loin d'être dénuée de talent. Et c'est ça le pire. Pour une nullos totale, irrécupérable, je ne me ferais pas la plus petite parcelle d'illusion, je ne me déplacerais pas et je ne paierais pas un ticket pour aller voir son dernier film. Mais non, pas Katell Quillévéré. Elle propose des intrigues familiales intéressantes, des personnages sonnant vrais. Elle dirige très bien ses interprètes. Vincent Lacoste est touchant de fragilité, sous une carapace bourgeoise. Anaïs Demoustier réussit à rendre attachante une femme qui peut être pourtant odieuse, voire détestable à certains moments. Les seconds rôles sont au taquet (même s'ils n'ont pas tous le droit à quelque chose de consistant pour la raison que je vais exposer plus loin !). Je ne me suis pas ennuyé une seule seconde.
Il y a des défauts d'ensemble. La reconstitution de l'immédiat après-guerre jusqu'aux années 1960 a l'allure proprette d'une production télévisuelle sans grande ambition. Visiblement, il n'y a pas de budget consacré au maquillage puisque les acteurs adultes sont juste vieillis, au mieux, en changeant de coupe de cheveux. La mise en scène reste la plupart du temps sans audace et sans originalité. Mais, même avec cela, ça passerait.
En fait, le gros problème du Temps d'aimer et même, globalement, de Quillévéré (parce qu'elle reproduit exactement la même connerie que dans Suzanne, un de ses précédents longs-métrages !), c'est que celle derrière la caméra veut raconter, sur une durée traditionnelle au cinéma (ici, juste un peu plus de deux heures !), toute une histoire familiale pouvant... devant... s'étendre, minimum, sur quatre-cinq heures. Il y aurait même largement la matière pour une bonne mini-série.
Le récit ne demandait qu'à se lâcher complètement sur l'ampleur romanesque. Malheureusement, la cinéaste réduit tout cela à néant, en y allant à la tronçonneuse avec de grosses ellipses temporelles. Conséquence, des thématiques fortes et profondes, comme les traumatismes de la guerre (le personnage féminin principal est une ancienne "tondue"... d'ailleurs, l'introduction du film, composée d'une série d'images d'archives, autour de cela, n'est pas loin de l'insoutenable !), la recherche du père, le désir féminin, l'homosexualité refoulée (à une époque lors de laquelle non seulement c'était mal vu, mais en plus illégal !), les ruptures familiales, les difficultés dans le couple, les conflits entre mère et fils, les relations entre père et fille, l'enfance négligée, l'élévation sociale, la maladie, la mort, l'amour... oui, tout ça... bref, des thématiques fortes et profondes qui n'ont pas la possibilité d'être un tant soit peu approfondies.
Ainsi, par exemple, la séquence finale, qui aurait pu être poignante de ouf (si le sujet des conflits entre la mère et le fils avait été creusé à fond !), ne dégage rien émotionnellement.
Pff... ce n'est pas le tout d'avoir pour ambition de parler du Temps de l'amour, encore faut-il savoir le prendre.
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Créée
le 30 nov. 2023
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