Produit la même année que Mon Voisin Totoro, qui est son antithèse euphorique, Le Tombeau des Lucioles est un Ghibli made in Isao Takahata précédé d'une réputation pour le moins conséquente, celui-ci étant qualifié comme un chef d'œuvre d'animation japonaise ; une autre composante fondamentale est son penchant foutrement dramatique, à même de faire pleurer quiconque observerait le devenir tragique de ces deux orphelins, vedettes malheureuses de ce sinistre récit dépeignant les vices d'une guerre destructrice…
Il va donc sans dire que j'ai chialé comme une madeleine, le film m'ayant finalement eut à l'usure, au point de me faire regretter de ne pas l'avoir vu avant Totoro, qui m'aurait fait le plus grand bien à sa suite.
Comme beaucoup le désespoir ambiant et faramineux composant Le Tombeau des Lucioles ne m'a donc pas ménagé, c'est fou comme on se retrouve pris au piège de cet enfer vicieux où la faim devient l'unique préoccupation de Seita et Setsuko, jeune fratrie peu à peu livrée à elle-même dans un Japon au bord de la rupture (1945) ; la trame en dresse un tableau peu réjouissant, et si l'on n'est que peu surpris de l'attitude odieuse d'une tante détestable, ce qui choque avant toute chose est l'indifférence générale dans laquelle ces derniers, et tant d'autres réfugiés, vont mourir à petit feu.
On a beau savoir que la guerre, c'est pas bien, il faut reconnaître que Le Tombeau des Lucioles est une éminence dans le genre, tant il le fait de façon crue et réaliste ; en soi le film n'est ainsi nullement agréable, il constitue une épreuve, un devoir de mémoire que l'on s'impose au fil de cette histoire dépourvue de tout espoir, à même de bouleverser les plus endurcis.
L'ambiance est donc des plus morose, parfaitement épaulée de la BO de Michio Mamiya, et il convient de souligner le réalisme impressionnant des personnages et autres décors, ce qui facilite grandement l'immersion ; néanmoins, la forme et le fond vont de paire, dans la mesure où l'animation n'est franchement pas agréable bien que très réussie.
On touche d'ailleurs au gros défaut du Tombeau de Luciole, à savoir qu'il s'enferme de bout en long dans son modèle d'œuvre hommage des plus concrètes, fort d'une absence totale d'échappatoires, et de rares instants de bonheur ne faisant que trop peu illusion : le ton était de toute façon donné d'entrée de jeu par l'éloquent "La nuit du 21 septembre 1945, je suis mort", auquel succédera une intrigue courue d'avance, mais non moins efficace (on pleure à n'en plus finir).
Chef d'œuvre naturel, Le Tombeau des Lucioles promet donc un visionnage des plus éprouvants, duquel on ressort chamboulé, mais pas forcément conquis car il est littéralement trop brut dans son traitement de sujet... dommage.