1949, Holly Martins, modeste écrivain américain, fauché, est appelé par un ancien ami à le rejoindre à Vienne pour lui confier un travail. Arrivé, celui-ci apprend que son ami est mort dans un accident, fauché par son conducteur. Pourtant, allant à la pêche aux informations, il se rend compte que plusieurs versions de l’accident circulent, et entre autre qu’il n’y aurait pas eu deux mais trois témoins de l’accident, mais qui est donc ce mystérieux troisième homme ? De même il se pourrait bien que son ami n’est pas été victime d’un simple accident… Holly décide donc de mener l’enquête. Sur son chemin il rencontre la compagne énigmatique et mystérieuse de son ami ainsi qu’un officier britannique duquel il apprend que son ami disparu n’est pas forcément celui qu’il croyait être …

Le Troisième Homme est un drôle de film noir. Certes il reprend certains codes (le passé, la recherche d’un disparu, la femme énigmatique …), mais s’en éloigne par moments. Nous ne sommes pas, pour moi, dans un film où l’ambiance est profondément pesante et sombre. L’atmosphère du film de Reed est étrange, une sorte de mix de plusieurs genres.
Tout d’abord l’ambiance d’une comédie, de par les fines boutades et situations comiques présentes mais aussi du fait de l’accompagnement sonore, d’une musique doté d’une mélodie qui marque les esprits et vous reste en tête même après le film (https://www.youtube.com/watch?v=r8jN1treRKQ) et donne ainsi un côté léger, reposant au film.
Mais l’ambiance du film est aussi mystérieuse, énigmatique par le fait de plusieurs éléments. Tout d’abord le scénario, qui reste pour moi perfectible sur certains points, mais qui demeure volontairement obscure par moments, qui ne donne pas clairement toutes les clés mais laisse l’imaginaire du spectateur travailler. Exemple typique, la femme savait ou ne savait pas ? (un indice dès les premières minutes).
Cette ambiance atypique est aussi renforcée par la remarquable réalisation de Carol Reed, dans un style aux côtés expressionnistes et surréalistes, de par le jeu d’ombres et des formes mais surtout l’utilisation récurrente de cadres obliques, penchés, bancales, comme pour décrire l’état d’esprit chancelant dans cette Vienne traumatisée d’après-guerre. Plans qui m’ont d’ailleurs un peu fait penser à du Terry Giliam dans Brazil ou du Orson Welles dans le Procès. Welles qui du reste, apparait de façon remarquable, resplendissante dans le film. Toute sa classe naturelle sautant aux yeux grâce au jeu de caméra astucieux de Reed et son habilité à manier les ombres sur cette séquence mémorable du pas de porte.
La réalisation de ce dernier comporte aussi un aspect « documentaire » par moments, dans une sorte de néoréalisme, dans la façon de filmer les méandres de la sublime ville de Vienne.
Il n’est sans doute pas nécessaire de le dire, mais je signale tout de même que la photographie est magnifique et le jeu de lumière remarquable. Du point de vue de la réalisation, c’est donc un sans-faute, un travail d’orfèvre.

Le Troisième Homme c’est aussi le genre de film que l’on retient pour certaines séquences. J’en ai retenu trois parmi d’autres. D’une part ce passage un peu surréaliste où un enfant accuse Holly d’avoir assassiné un homme, ce qui bien entendu est faux, et provoquant la réaction impulsive, non réfléchie, de tous les badauds aux alentours qui ne mettent pas en doute la parole du petit et se mettent à poursuivre notre pauvre bougre d’Holly !
Bien entendu, LA grande séquence du film, que reste cette fameuse et remarquable course poursuite dans les égouts, qui demeure une petite merveille de mise en scène ! Je préfère ne pas trop m’étendre sur le sujet, de peur de spoiler méchamment un lecteur n’ayant pas vu le film …
Et enfin, parmi les scènes réussies on peut citer le plan final, que je ne décrirais pas mais qui est bien trouvé et permet au film de se terminer de la plus belle des façons.


Essayer de mettre en lien plusieurs films est toujours un exercice amusant à faire lors d’un visionnage. Et ici, un film arrive clairement en tête en regardant le troisième homme, M le Maudit. Au-delà de l’analyse de fond qui sans doute pourrait être faite entre les deux œuvres, le film de Fritz Lang vient spontanément en tête, outre la réalisation, du fait de la présence dans le film de Reed d’un enfant attaché à sa petite balle qui intervient plusieurs fois, et surtout l’apparition d’un fameux marchand de ballons ! Sûrement fait exprès, anecdotique, mais toujours plaisant à voir.



Pour autant, le film n’est pas exempts de reproches. J’ai déjà évoqué le scénario, sombre, pessimiste, peut être sujet à critiques sur certains points (de détails principalement, je précise, mais qui peuvent se révéler gênants), un rythme irrégulier, une romance quelconque et peu intéressante, une écriture des personnages pas forcément géniale, d’un manque de profondeur de ceux-ci (Welles malgré son talent et son rôle de personnage cynique, désabusé et « amoral » est en fait plutôt anecdotique), et de leurs comportements assez étranges par instants (Holly qui change d’avis toutes les 5 secondes), voire d’un jeu un peu trop théâtrale.


On pourra me dire que je suis un peu aigre sur ma notation, mais j’ai n’ai pas trouvé le « fond » assez intéressant pour mettre plus, malgré que la forme (ambiance, réalisation) reste d’un niveau assez remarquable, surtout pour l'époque …
En tout cas, un film à voir.

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30
9

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