Dans Le puits et le pendule, nouvelle écrite en 1842, Edgar Allan Poe décrit la situation plus qu’inconfortable d’un prisonnier se retrouvant dans une grande pièce souterraine, allongé sur le dos et ligoté, tandis qu’une immense lame aiguisée, se balançant dans un mouvement de pendule, descend peu à peu sur lui.
Tandis qu’il regarde, fasciné et terrifié l’immense lame qui arrive sur lui et qu’il tente désespérément de trouver une idée pour se sortir de sa fâcheuse position, les murs enflammés commencent à se rapprocher de lui et menacent de le faire tomber dans un puits.
Telle est, au détail près des murs enflammés et du puits qui lui seront épargnés, la préoccupante situation dans laquelle se trouvera Lex Barker, interprétant le héros du film Le vampire et le sang des vierges, dans le moment culminant de l’histoire.
Un château sombre, aux couloirs formant un labyrinthe et menant dans des endroits des plus aimables - chambre des tortures où un serviteur mort-vivant tente de ramener son maître à la vie, couloir envahi de vautours, fosse aux serpents... – constitue le décor principal du film, hommage aux histoires d’Edgar Poe plus que réelle adaptation.
Le film s’ouvre de manière charmante par la scène d’écartèlement d’un homme monstrueux, le Comte Regulus, responsable de l’enlèvement et du supplice de douze jeunes filles d’une jolie petite ville bavaroise.
L’histoire se passe au XVIIIème siècle et introduit, outre le sympathique Comte, le juge qui prononcera sa sentence – on y reconnait Lex Barker qui a rangé depuis près de 20 ans son pagne de Tarzan, et se retrouve ici affublé d’une belle perruque de juge- et la belle Karin Dor - célèbre actrice allemande, qui jouera dans de nombreux krimis et se trouvera à plusieurs reprises la partenaire de Lex -, dans le rôle de la treizième victime, ayant quant à elle échappé à son sinistre sort.
L’histoire nous amène rapidement 35 ans plus tard où nous retrouvons nos deux héros, Roger et Lilian, venus à l’invitation du Comte Regulus, qui doit leur apprendre la vérité sur leur passé.
Retrouvant tels quels les personnages, on se doute assez vite que l’on a affaire à leurs descendants, bien que ceux-ci ignorent apparemment tout de l’histoire de leur famille et Roger ne connaît ni ses parents ni son véritable nom.
Dans la petite ville où ils arrivent et se rencontrent, ils sont surpris de l’accueil des habitants lorsqu’ils se renseignent sur le chemin du château du Comte. Ils apprennent alors que celui-ci est mort depuis 35 ans.
Quant on est un héros, on ne se laisse pas arrêter par de semblables détails, et sachant que la belle Lilian se rend aussi au château mystérieux, Roger, entraînant son cocher terrifié et accompagné d’un soi-disant prêtre prêt à lui indiquer le chemin, se lance sur les routes.
Le chemin vers le château est un pur délice de détails macabres et dignes d’un décor d’Halloween, dans la pure tradition gothique des films Hammer ou des films d’horreur italiens des années 60.
Des cavaliers tout de noir vêtus galopent dans la nuit et assaillent la voiture de Lilian, l’auberge où ils pensent s’arrêter n’est plus que ruines tandis que les arbres torturés semblent se refermer sur les voyageurs.
Dans une brume de plus en plus épaisse et inquiétante, traversant la forêt où les arbres abritent des restes humains divers et rencontrant ruines et cimetière, les personnages vont arriver à l’étrange demeure du Comte.
On se doute immédiatement que l’intérieur ne se sera guère plus accueillant d’autant plus que le château semble également réduit en cendres et que l’entrée se fera par un caveau !
Le réalisateur de ce film gothique est Harald Reinl, peu habitué du genre films de vampires, mais plutôt des krimis, tels La grenouille attaque Scotland Yard – voir ma critique – ou encore plusieurs films mettant en scène le personnage du Dr Mabuse. On y retrouvait pourtant souvent aussi cette atmosphère de mystère – sans le côté surnaturel -, certains décors baroques et un goût prononcé pour les personnages étranges, enlèvements mystérieux et sombres demeures.
Pour incarner le sinistre Comte Regulus, comment ne pas faire appel au grand Christopher Lee ?
Celui-ci n’apparaîtra cependant que fort peu dans l’histoire, bien qu’il en soit l’élément central.
Revenir spectral de l’au-delà, et généralement avec des intentions maléfiques, semble être une spécialité de notre Sir et il y met toujours le plus grand sérieux. C’est pourtant son serviteur Anathol, qui représente le véritable mauvais de l’histoire, apparaissant sous divers déguisements et déclenchant les pièges au fur et à mesure de l’avancée des hôtes malgré eux.
Bien sûr, ce style d’horreur ne distille pas de peur ou d’angoisse, mais est des plus intrigants…on pourrait dire kitsch.
Sans valoir les classiques de la Hammer ou même l’excellent Mystère du château noir de Nathan Juran, Le vampire et le sang des vierges se suit cependant avec plaisir pour son décor baroque, sa reprise des éléments des histoires à la Edgar Poe et ses multiples rebondissements.
Autre film du genre : Le mystère du château noir
https://www.senscritique.com/film/Le_Mystere_du_chateau_noir/critique/118952911
Pour en savoir plus sur les krimis :
https://www.senscritique.com/film/La_Grenouille_attaque_Scotland_Yard/critique/199352609