Barbet Schroeder retrace le déchirement de la Birmanie, où la peur et la haine de l’autre nourrit la montée du nationalisme depuis plusieurs décennies. Sans oublier d’effectuer un fin parallèle avec notre propre perception des minorités en France.
“La haine est certainement le plus durable des plaisirs”. Ainsi débute Le Vénérable W., qui déconstruit le présupposé selon lequel la religion bouddhiste serait la seule religion à n’avoir point succombé à l’extrémisme. En réalité, la communauté Rohingya en Birmanie est victime d’une oppression telle que certains évoquent le genocide, le tout instigué par un mouvement de moines bouddhistes nationalistes, et leur meneur, Wirathu.
Barbet Schroeder alterne différents points de vue. Tout d’abord celui de Wirathu qui décrit les violences perpétrées par la communauté musulmane en Birmanie. Toute personne non familière avec le sujet écoute sans discuter les affirmations de ce moine. Puis viennent les témoignages suivants… et notre point de vue se nuance, jusqu’à comprendre qui sont les véritables persecuteurs. Les écrits bouddhiques, évoquait l’amour et la tolérance, s’affichent de temps en temps à l’écran comme un rappel de l’ironie de la situation, tandis que Wirathu, pas si vénérable, explique à demi-mots qu’il faut conserver la pureté du sang birman.
La description de la propagation des violences en Birmanie répond à notre compréhension progressive de ce qui se trame devant nos yeux et dans le monde. Avant même que les mots “une nation où la race est liée à la religion” ne soient proférés, nous avons compris que l’histoire se répétait : en France, aux Etats-Unis, partout.
Nul besoin d’être habité des pires intentions, car la haine et le racisme se dissimulent sous un habit d’intentions louables pour tromper ses meilleurs soldats. Barbet Schroeder signe ainsi un petit brûlot fort et intemporel, qui vient clôturer sa “Trilogie du mal”.