Bon, je ne voulais pas voir ce "dernier" Miyazaki, que je gardais comme une "poire pour ma soif". Et puis les critiques que j'avais lues me préoccupaient : le premier film "adulte" du Maître, l'abandon du merveilleux typique de ses plus belles œuvres, et puis l'ambigüité derrière la célébration d'un ingénieur génial ayant donné naissance au plus bel instrument de guerre (le fameux "Zero") de l'impérialisme nippon. Et en effet, lorsque l'envie est devenue irrésistible, et alors que se profile l'espoir d'un retour de Miyazaki, "le Vent se Lève" m'a autant enchanté - grâce à sa munificence visuelle, grâce à ses superbes scènes oniriques qui retrouvent l'enchantement hypnotique de ses meilleurs films - que déçu : cette première histoire d'amour montrée par Miyazaki est bien fade, passant clairement au second plan par rapport à la passion de Jirô Horikoshi pour son métier d'ingénieur aéronautique, tandis que l'aveuglement du scientifique (de l'artiste ?), créant le chef d'œuvre de sa vie sans se préoccuper de l'utilisation de ce dernier par un gouvernement fasciste, est quand même assez peu exploré, chose curieuse pour un homme aussi fondamentalement pacifique que Miyazaki. "Le Vent se Lève" souffre également d'une longueur excessive, sans doute imputable à la passion de Miyazaki pour son sujet, que cela soit du fait du parallèle avec sa propre existence de créateur stakhanoviste, ou de l'aspect profondément autobiographique du sujet (on sait que son père était sous-traitant de Mitsubishi aviation). Ceci dit, il reste ici suffisamment de moments magiques, comme la stupéfiante représentation animiste du grand séisme de Kantô de 1923, pour confirmer le génie absolu de Miyazaki. [Critique écrite en 2017]