Ce qui est un peu agaçant avec mes éclaireurs, c'est qu'ils sont drôlement chouettes.
Moi, j'arrive après la guerre, car il a fallu le temps que le film, sorti en France il y a 3 semaines, voyage jusqu'au confins du monde pour atteindre mon beau pays qu'est la Belgique!Comment ça il y a une frontière commune!?
Je suis toujours prévenu en dernier des trucs flippants. Il manquerait plus que la France veuille se rattacher à la Wallonie et qu'on doive se taper vos hommes politiques, et vos demeurés homophobes. Les nôtres sont déjà pas jojo, mais il y a des limites!
Ce qui est agaçant avec mes éclaireurs, donc, c'est qu'ils sont chouettes et qu'ils ont souvent dit a peu près tout ce qu'il y avait à dire, et à moi, il ne reste que les miettes. Alors après, je suis obligé de parler de choses qui n'ont strictement rien à voir dans ma critique, et ça la fout mal.
Je vais donc essayer de parler de ce bien beau nouveau/dernier film de Hayao Miyazaki, et il faudra m'excuser si je répète certaines des choses que vous avez dit les copains.
Le film s'ouvre par une séquence de rêve absolument magnifique qui résume à elle seule tout le parcours du personnage au long du film; les rêves de Jiro, au départ doux, aérien évidemment, sont envahis par des machines volantes dont la violence et la noirceur se voient et se ressentent à un niveau organique. Cette séquence, et toutes les séquences de rêve du film d'ailleurs, valent à elles seules le prix du ticket.
En regardant le film, on ne peut s'empêcher de voir en lui une oeuvre testament.
Miyazaki y reprend le thème du vent qui parcours toute son oeuvre, et rempli son film de merveilleuses machines volantes qui figurent elle aussi en bonne place dans tous ses films. Il dresse également un parallèle entre les obsessions de Jiro et les siennes, comme la relation que l'un et l'autre ont vis à vis de leur travail, et il est difficile de ne pas y voir en partie autant une auto-biographie qu'un biopic
Mais en dehors de cet aspect thématique et esthétique, on peut également parler d'une oeuvre testament, car je pense que Miyazaki veut nous faire passer un ultime message avant de s'en aller.
Ce message est avant tout une mise en garde, mais est également un message d'espoir.
Mise en garde, car en décrivant longuement le contexte du japon de l'époque: crise économique, tremblement de terre apportant la destruction, et la guerre qui suit quelques années plus tard, j'ai vraiment l'impression qu'il tente à demi-mots de parler de notre époque. Peut-être est-ce moi qui par ma vision déformée y vois plus que ce que le maître à voulu faire passer, toujours est-il que les parallèles avec l'actualité récente me paraissent saisissant.
Miyazaki nous dis donc que nous devrions faire attention, car le vent se lève (s'il s'appelait George R.R Martin, il nous dirait surement que l'hiver vient). Un message en fait assez engagé masqué derrière le biopic d'un homme vivant à une époque tourmentée.
Mais un message d'espoir également, car en empruntant les vers: " le vent se lève, il faut tenter de vivre" au poème de Paul Valery "le cimeterre marin" qui sert de titre et de leitmotiv au film, Miyazaki nous incite à essayer de vivre, d'aimer, tout en nous rappelant que d'autres ont vécus des moments difficiles avant nous, et surtout, nous incite à essayer de continuer à suivre nos rêves, même s'il sait que les hommes sont prompts à transformer les rêves des uns en cauchemars pour d'autres.
La dernière séquence de rêve, bouleversante, est il me semble le reflet exact de ce propos.
La partie plus réaliste est un rien moins prenante, même si Miyazaki n'a pas à en rougir, mais on la regarde un peu hébété, la tête encore emplie des résidus d'un rêve emporté par le vent qui ne reviendra plus; le rêve d'un grand monsieur et notre rêve à nous, un rêve que nous avions en commun comme Jiro et Caproni.