Le Vent se lève, biographie largement romancée d'un ingénieur aéronautique japonais de l'entre-deux-guerres, est sans doute le film le plus paradoxal de Miyazaki.
Il commence sur une promesse de légèreté, de douceur et de rosée fraîche. Il s'ouvre même sur un vers de Paul Valéry, du Cimetière marin : Le vent se lève! Il faut tenter de vivre! Et toute la première partie du film, de l'enfance jusqu'à ses retrouvailles avec sa future épouse, tient la promesse. On suit presque avec nonchalance, pas à pas, le parcours de notre héros, où nous guettent une farouche envie d'aventure avec son idole, un ingénieur italien aux inventions aériennes rocambolesques, et une subtile mélancolie à la pensée de son histoire d'amour initialement manquée. Au terme de cette première partie, on se croirait presque devant Porco Rosso.
Puis vient la deuxième partie, triste au possible. Si on s'en tient à l'histoire objective, notre héros fait le choix de sacrifier son épouse, qui succombera jeune à la tuberculose alors qu'un espoir de guérison existait, pour poursuivre son rêve de construire un formidable avion… qui deviendra un outil de mort pour des dizaines de milliers de personnes. Certes, il aura atteint son objectif, mais à quel prix ? A rebours de ce vers qu'il récitait de temps à autre, et alors même que le vent se levait pour lui, il a choisi la mort.
C'est quand même d'une tristesse sans nom que le film le plus réaliste de Miyazaki, le seul qui se situe dans notre monde, à une période bien identifiée et presque sans élément fantastique, soit également son plus déprimant - et de très loin.