Le vent souffle, le feu ça brule et l'eau ça mouille
Le Vent se lève est un chef d'oeuvre dans la filmographie d'Hayao Miyazaki, autant mettre directement les pieds dans le plat tant cette phrase sonne comme une évidence pour moi à la sortie de la séance. Il est très dur de se rendre compte après coup que le film est sans aucun doute le dernier de sa carrière. C'est d'autant plus une grande tristesse que le film est bien à part parmi ses autres oeuvres. C'est sans aucun doute le film le plus abouti pour lui. Bien loin de toute la magie qu'a un Totoro, de l'épique d'un Mononoké ou de la légèreté d'un Chihiro, Le Vent se lève s'attaque à un registre inédit à savoir celui de la biographie romancée.
On dresse donc ici le portrait d'un personnage jamais vu jusque ici, celui d'un héros ambigu. Ce héros, bien qu'animé des meilleures intentions du monde va quand même blesser son entourage. Le propos du film s'articule tout autour des réussites et des échecs de cet ingénieur aéronautique et termine sur une note presque testamentaire. Difficile de ne pas percevoir un portrait déformé de Miyazaki lui même. Le cinéaste porte un regard lucide sur son parcours d'artiste et même personnel au travers de ce film.
Mais ne perdons pas de vue ce qui a fait la force du réalisateur tout au long de sa carrière, au delà de l'aspect métaphorique, toute la virtuosité d'animation ne cesse d'émerveiller le spectateur ébahi devant tant de poésie et d'émotions. Ici le ciel est un terrain de jeu pour le héros qui dans ses rêves les plus fous nous propose des paysages débordant de détails. Le temps s'arrête littéralement lors de ses songes.
Comment ne pas aborder la relation amoureuse du héros ? Quelle prouesse dans son traitement. Même si cela peut paraître complètement larmoyant, le tout est traité de manière très intelligente tant cela sonne comme une évidence. Tout au long de la romance le spectateur est partagé en même temps que le héros entre sa carrière prenant une place énorme dans sa vie et entre sa femme quelque peu délaissée mais totalement dévouée.
Se démarquer pour se réinventer est sans aucun doute le credo du film qui parvient à osciller intelligemment entre joie et tristesse, entre tendresse et peur de perdre l'être aimé. Le film nous invite tout naturellement à profiter de nos plus belles années de notre vie tout en ne regrettant rien, même les moments les plus douloureux.
Proposer autant de virtuosité et de sagesse en deux heures relève du prodige absolu qu'il convient de savourer comme il se doit. Alors à moins d'un retournement de situation: "Adieu et merci pour tout."