Je ne sais pas très bien comment faire quand je me trouve devant un film que tout le monde encense mais devant lequel moi, je ne décolle pas. Je ne sais comment exprimer ce qui ne va pas devant un film que je sais pertinemment excellent mais qui me laisse clairement et totalement froide. Défendre mon point de vue face à "Le vent se lève", ambitieux, adulte, totalement unique dans la filmographie du réalisateur et manifestement réussi ne va pas être simple, mais je m'y attelle.
Je ne parlerais pas de l'espect graphique du film. On est d'accord que de ce point de vue là le film est impeccable. Comme toujours chez le maitre, la mise en scène tout comme les dessins et l'animation sont exempts de tout reproches. On en prend plein les yeux et les foules sont particulièrement impressionnantes. Les ellipses savent se passer d'effets stéréotypés et cela est aussi agréable. Quant à la musique, bien que différente des autres oeuvres de Hisaishi, elle est également très belle. Mais personnellement, l'un des points de la bande son m'a clairement chiffonné. Les bruitages faits à la bouche. Je sais que cela est une volonté de Miyazaki pour rendre les avions plus vivants, mais à chaque fois que je les entendais, j'attendais seulement que ça s'arrête car je trouvais cela très étrange, incongru, et désagréable. Ça m'a réellement agacée pendant tout le long, difficile alors de me concentrer pleinement sur les scènes les contenant... d'autant que ce profond agacement ne s'atténue absolumment pas avec d'autres visionnages. J'ignore d'où me viens ce dégout, mais je ne peux passer au-dessus.
Passons à l'histoire, maintenant. L'absence de fantastique ne me dérange absolumment pas, ni le rythme lent, d'ailleurs. L'aspect historique a été très intéressant à découvrir pour moi qui ne savais rien du début du XXe siècle au Japon et connaissant Miyazaki, il est sans doute très bien retranscrit. Mais même si ça m'a fait mal de le reconnaitre, devant ce film, je me suis souvent ennuyée, particulièrement pendant la période où Jiro travaille à Mitsubishi. J'ai trouvé ce moment excessivement long. Peut-être parce que je ne m'intéresse absolumment pas aux avions normalement. Mais en réalité, je dois reconnaitre que plusieurs points du scénario m'ont réellement gâché la découverte d'un message et d'un positionnement pris sur le concepteur d'avion de guerre (ou plutôt l'absence de positionnement pris, mais c'est ça qui est génial) à la base vraiment intéressants. Les rêveries de Jiro avec Caproni, par exemple. Ces scènes n'ont eu pour moi aucune utilité. Elles plombent le récit et l'allongent inutilement, n'apportent rien. En fait, la seule qui a eu une quelconque utilité est celle où Caproni annonce à Jiro qu'un artiste tout comme un ingénieur n'a que 10 ans de créativité devant lui. Les autres m'ont seulement exaspérées. Selon moi, une scène comme celle ou Honjo l'appelle tandis que Jiro est perdu dans ses chiffres et l'image de l'avion de ses rêves au point qu'il ne l'entend pas suffisaient amplement pour montrer la passion du jeune homme pour son travail et son côté rêveur. Alors que ces scènes, pour moi, cassent le rythme.
Un autre point qui me chiffonne est le personnage de Jiro lui-même. Je n'ai absolumment pas réussi un seul instant à m'attacher à lui. Et comme c'est lui que l'on suit tout le long, cela a représenté un réel handicap. Ce qui me gênait, ce n'était pas qu'il soit égoiste et totalement pris dans son travail, ce n'était pas qu'il fasse un avion tout en sachant qu'il allait indirectement tuer des milliers de personnes. Non, ça, j'ai même trouvé cela intéressant, très mature et juste, ainsi que très représentatif de l'humain. Non, vraiment, ce qui m'a gêné, c'est de ne pas arriver un seul instant ni à ressentir d'empathie pour lui, ni à vibrer avec lui pour les avions, ni à rien du tout. En fait, je me suis sentie totalement déconnectée de sa vie, comme si au fond, elle ne m'intéressait pas vraiment, alors que paradoxalement le film n'a rien de désagréable à suivre. En fait, j'ai suivi sa vie sans me plaindre, mais sans vibrer non plus . La scène final sensée être émouvante m'a laissée totalement de glace, moi qui pourtant suis très sensible. En fait, c'est réellement cela qui est gênant pour moi. Je suis aussi détachée de Jiro que lui l'est du reste du monde. Il ne m'émeut pas.
En fait, cela ne m'étonne pas que Nahako soit mise en avant sur l'affiche française du film : c'est avec elle qu'apparaissent les rares moments ou l'on ressent de l'émotion. Malheureusement, ces moments restent bien fugaces...
Quelques scènes, fort heureusement, sont magistrales : le flirt avec les avions de papier est la première qui me vient à l'esprit tant elle est belle sans basculer dans la niaiserie. Dans ces moments alors, oui, je retrouve tout mon intérêt pour le film. Mais vela retombe vite et je regrette, je regrette vraiment que tout ne soit pas ainsi...
Ce dernier Miyazaki est très bon. Excellent, même. Et c'est bien pour cela que je me suis en quelque sorte "acharnée" à le revisionner pour tenter de me l'approprier. Mais j'ai bien peur d'être passée à coté, ou alors que ça ne soit pas un film pour moi, tout simplement. Le vent s'est levé, mais il ne m'a pas emporté. J'en suis la première désolée.