En 2004, M. Night Shyamalan enchaîne les succès commerciaux. Après Sixième Sens, Incassable et Signes, trois succès d'une qualité plutôt décroissante, il réalise un film à nouveau axé sur une atmosphère obscure et mystérieuse.
Le Village se déroule dans un lieu reclus, avec des décors construits pour l'occasion. Durant la première partie, difficile de discerner distinctement un personnage principal : Shyamalan présente majoritairement des plans d'ensemble, accentuant l'aspect communautaire de ce petit village. Mais d'une manière générale, le cadre sert surtout l'atmosphère ; par exemple, la vue de dessus sur le cercueil, au début du film, donne comme une impression d'une vue subjective de présence omnisciente.
Et cette présence impalpable se marie très bien avec l'ambiance énigmatique de folk horror que dégage Le Village. Le doute est tel qu’on a l’impression de voir un film fantastique, alors qu'il reste dans les faits très terre à terre. On sent toujours que quelque chose nous échappe, et le film devient alors assez anxiogène, sans être trop haletant.
Le film cultive peut-être trop cette idée de mystère, si bien que durant toute la première heure, on a l'impression d'être délaissé, sans aucune clé pour comprendre ce qu'on nous cache, ce qui peut être assez frustrant, voire susciter l'ennui, car le rythme n'est pas très effréné durant cette première partie.
Mais bien sûr, c'est là qu'intervient tout le génie de Shyamalan. Ce choix de mystère insistant s'explique : le spectateur se met à la place des personnages, et adopte leurs points de vue.
Les mystères insondables s’avèrent donc indispensables, même si je ne trouve pas qu'ils fassent l'effet d'une véritable immersion.
Les secrets ésotériques sur lesquels s'appuie le film reflètent une pensée chère au cinéma de Shyamalan : la vérité masquée par des apparences (littéralement, dans ce cas-ci). On retrouve cette thématique dans Signes, avec des aliens trop vite jugés, ou Sixième Sens, dont toute l’intrigue consiste à rechercher une vérité que l’on se voile inconsciemment.
Il s'agit finalement d'une grosse caverne de Platon, qui parvient à être énigmatique tout en restant cohérent et surprenant dans son dénouement. L'interprétation d'Adrien Brody, dont le personnage contribue à pervertir l'atmosphère, est particulièrement réussie, mais en dehors de cela, Le Village n'est peut-être pas assez percutant ; il manque de puissance, de force de frappe, même s'il réserve quelques bonnes surprises.