Le Village des ombres par cloneweb
L'année 2010 aura été riche en matière de cinéma français à connotation fantastique (pour ne pas employer le terme « genre », beaucoup trop connoté). Il y avait certes du bon (Djinns), du moins bon (La Meute) du con-bourrin (La Horde) mais tous ces cinéastes ont eu le mérite d'essayer. Qui plus est, certains d'entre eux tentent de se démarquer en offrant des choses différentes.
Quelque part, comme je le disais juste au dessus, le terme « film de genre » a été approprié par quelques cinéastes un peu trop jusqu'au-boutistes. Ainsi, qu'on parle du « genre français », on pense plus facilement à Alexandre Aja, Alexandre Bustillo, à Xavier Gens ou au duo Dahan/Rocher. Pourtant, on devrait y inclure aussi des titres comme 8th Wonderland.
A cause de cette appropriation, sûrement plus dues aux critiques papier aimant cataloguer ce qu'ils voient, on parle désormais également de film fantastique français, case dans laquelle on peut mettre Hugues et Sandra Martin par exemple. On peut également désormais y ranger Fouad Benhammou qui livre ici son premier long métrage fourmillant de bonnes choses.
Le Village des Ombres a au départ un pitch classique : des jeunes en vacances dans un village disparaissent les uns après les autres. On pense à un slasher mais on pense aussi, plus légèrement, à Dix Petits Nègres d'Agatha Christie. Pourquoi cette comparaison ? Parce que le film n'est pas, comme c'est bien précisé sur l'affiche, un film d'horreur. C'est un conte fantastique.
Et c'est d'abord un conte fantastique rudement bien mené. A défaut d'avoir bénéficié d'un budget de fou, Fouad Benhammou soigne ses ambiances. Qu'on évoque le village, la maison, ou même des passages plus fantastiques, tout y est très propre et très détaillé. On glanera également, par ci par là des références très discrètes (par exemple à Lovecraft sur un tableau, vous chercherez), prouvant la culture cinématographique intéressante du bonhomme.
L'autre point fort du film est son casting. Et quand on sait que l'actrice prévue pour le premier rôle a lâché l'équipe un peu avant le tournage, on ne peut qu'apprécier la prestation de sa remplaçante : l'incroyable (et incroyablement jolie) Christa Theret. Pour ma part, c'est la première fois que je la voyais à l'écran, n'ayant pas vu le fameux LOL. Excellente actrice, elle est accompagnée par un casting qui n'est pas en reste, notamment Ornella Boulé qu'on espère revoir vite ailleurs.
Je reproche souvent au cinéma français (bien plus qu'au cinéma américain) d'avoir des acteurs qui se complaisent dans le non-jeu. C'est le cas, au hasard, d'une tripotée de seconds rôles dans La Môme ou encore de Grégoire Leprince Ringuet dans Djinns pour ne citer que ceux qui me passent par la tête au moment où ces lignes sont écrites. Absence d'émotion, jeu plat, c'est souvent un peu le « venez comme vous êtes » du cinéma.
Le Village des Ombres, c'est à ce niveau là, tout l'inverse. Le casting est sans faille (on notera en passant la sympathique apparition de Richard Darbois qui n'est donc pas qu'une voix) et la direction d'acteur exceptionnelle.
Le Village des Ombres, c'est aussi une ambiance oppressante, une inquiétude qui grandit au fur et à mesure qu'on avance dans l'intrigue et un sujet prenant (« Mais qui ou quoi est vraiment derrière tout ça ? »). On en dira pas plus pour ne pas spoiler l'histoire si ce n'est que le scénario a le gros défaut de trop se perdre dans les fausses pistes, très, trop différentes des unes des autres. Entre des plans sur les maisons (« Et si le village était vivant ? »), caméra à la première personne rappelant Predator (« Une créature est-elle responsable ? ») ou flashbacks sur les personnages (« Et si c'était la faute de l'un d'eux ? »), on est trop perdu. Et parfois, on finit par sortir du film. Et c'est d'autant plus dommage que la véritable raison de tout cela est suffisamment complexe pour se suffire à elle-même. Tous ces artifices, parfois trop référencés d'ailleurs, sont malheureusement inutiles.
Le film a donc des défauts mais rien d'insurmontable. A choisir, préferez-le donc à la Meute. Et notez dans un coin de votre tête les noms du générique : Ornella, Christa, Fouad. On reparlera d'eux, c'est certain.
- Marc
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