Ahmed, un voleur arrogant traîne dans les rues de Bagdad. Un jour, il voit la fille du sultan dans le palais et en tombe fou amoureux. ça tombe bien, la belle doit bientôt se marier. Un oracle des sables de La Mecques lui annonce que celui qui touchera le rosier de son jardin sera son mari. Ahmed se fait passer pour un prince et plonge involontairement dans le rosier, mais un de ses concurrents, le fourbe roi des Mongols, fait savoir qu'il est un voleur. Il est attrapé et bastonné. La princesse, pour gagner du temps, donne sept jours aux autres prétendants : celui qui ramènera l'objet le plus exceptionnel obtiendra sa main. Le fourbe fait empoisonner la princesse pour pouvoir la guérir avec une pomme magique et ainsi gagner des points. Mais son plan ne marche pas bien, car il est censé avoir appris l'empoisonnement grâce au cristal magique d'un autre concurrent, et être revenu sur le tapis volant du dernier. Monsieur Méchant décide donc de prendre le pouvoir, grâce aux 20 000 mongols qu'il a habilement caché dans la capitale.
Mais Ahmed revient, avec un cheval ailé, un costume de prince en lamé et un coffre magique d'où il fait sortir une armée magique. L'armée du méchant se rend, et le sultant donne sa fille au héros du jour.
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J'ai envie d'aimer ce film, qui est fort créatif visuellement, mais il y a aussi des choses qui me font tiquer. Commençons par là. Fairbanks se donne un look de pirate avec boucles d'oreille plutôt que de voleur arabe. Les décors des rues de Bagdad, bienqu'immenses, font très carton-pâte, et on devine facilement les toiles peintes. Certes, il y a beaucoup de figurants, mais ce n'est pas non plus "Intolerance" de Griffith (même si on sent une volonté d'émulation).
On a là, encore une fois, une représentation de l'Orient encore une fois tel qu'il est rêvé par le public occidental. Ahmed, cherchant la rédemption, va voir l'imam comme on irait consulter le pasteur. Il dit qu'il est amoureux d'une princesse. L'imam répond "Deviens prince ! Tu as en toi le désir du bonheur, mais il faut le gagner par tes propres moyens". Crédo américain en diable, rappelé lourdement à la fin : le couple s'en va en tapis volant et les étoiles dessinent la maxime "Happiness must be earned". Broumf.
Que dire du méchant mongol, en fait le stéréotype du Chinois fourbe et cruel, qui finit d'ailleurs suspendu par sa natte ? Ou de l'actrice féminine principale, qui rappelle bien plus une beauté victorienne à la Rossetti qu'une héroïne orientale ?
A côté de ça, le film est un véritable ouvroir de l'imaginaire visuel, mais disons qu'il fait mouche une fois sur deux. On trouve des tours de passe-passe qui rappellent Méliès (le panier magique, la corde, l'armée qu'Ahmed sème autour de lui). On trouve aussi déjà le procédé de la nuit américaine.
Les effets visuels les plus frappants se trouvent dans le coeur du film, lors du voyage initiatique, qui est hélas un peu court. 1e lune : la vallée de feu. 2e lune : le tapis volant. 3e lune : la vallée des monstres. SI le dragon meurt avec beaucoup de plasticité, la chauve-souris géante de la vallée des arbres magiques est vraiment ridicule, et Fairbanks la tue sans grande conviction. 5e lune : le sage de la mer de minuit ; combat sous l'eau avec des araignées. Trucage de nage sous l'eau étonnant, pas très naturel. Clé qui donne accès au cheval ailé. 6e lune : la pomme magique qui guérit tout.
J'ai été particulièrement bluffé par le tapis volant, plutôt crédible.
Enfin, il y a Fairbanks, mais j'avoue être un peu sur ma fin, par rapport au masque de Zorro. Son jeu est ici très outré, et ne s'inscrit pas bien dans le décor oriental. C'est vraiment dommage, vu l'énergie dépensée.
Sinon, on retrouve les thématiques walshiennes : un héros qui ne croit qu'en sa propre force, plutôt amoral, qui montre une extrême fragilité dès qu'il est confronté à l'amour. ça n'a pas très bien vieilli, vu que la condition féminine a évolué.
"Le voleur de Bagdad" est un film que j'aime, et que je revisionnerai à l'occasion, pour son imaginaire visuel généreux plus que pour son contenu assez neuneu.