Le Voyage de Chihiro
8.4
Le Voyage de Chihiro

Long-métrage d'animation de Hayao Miyazaki (2001)

Si "Princesse Mononoké" avait déjà révélé au monde entier le génie de son auteur, il aura encore fallu attendre "Le voyage de Chihiro" pour que ce dernier soit définitivement gravé dans le marbre. Chef d'œuvre parmi les chefs d'œuvre, il est l'occasion pour le maître japonais de laisser exploser son imaginaire et de faire voyager le spectateur dans l'univers foisonnant d'une culture fascinante (qui ne manquera pas de nous dépayser, nous les occidentaux) pour au final nous faire partager son regard sur le monde.


À travers ce monde gorgé d'excès en tous genres dans lequel voyage la jeune Chihiro, Miyazaki ne fait que tendre un miroir déformant au sien, celui de la société japonaise d'aujourd'hui (et pas seulement ...). À l'image du Sans-Visage - créature terrifiante et grotesque créant de l'or à volonté pour soudoyer n'importe qui, cette société rongée par l'avidité et le pouvoir de l'argent s'englue toujours plus dans appétit morbide qui ne fait qu'accélerer sa décomposition.


Mais toujours chez Miyazaki la grande réfléxion (en général pessimiste) s'accompagne d'une réfléxion bien plus intimiste et porteuse d'espoir. À travers le parcours initiatique de l'héroïne, le cinéaste traite du passage de l'enfance à l'adolescence : un premier amour (quoique peut être imaginaire mais en tous cas bien réel dans le coeur de la jeune fille), l'omniprésence du thème du temps (un parc où ce dernier semble suspendu, un train filant sur des eaux calmes, un dragon-rivière - qui permet à Miyazaki de montrer une fois de plus combien il est un grand poète), la prise de conscience de l'hostilité du monde ... il tire, avec toujours son extraordinaire sensibilité, la quintessence de cette difficile transition, qui verra venir une véritable responsabilisation de l'individu. Un individu qui saura peut être participer à la construction d'un monde meilleur ...


Une fois de plus, les sublimes dessins du réalisateur ne sonnent pas creux et témoignent d'une intelligence rare, d'une capacité à décrire le monde et à en rendre compte inouïe et d'un sens de la poésie incontestable. Une fois de plus, le monde cruel dépeint laisse entrevoir - toujours au plus proche des êtres - la possibilité d'un avenir plus radieux.

Créée

le 12 juil. 2012

Critique lue 568 fois

10 j'aime

Trelkovsky-

Écrit par

Critique lue 568 fois

10

D'autres avis sur Le Voyage de Chihiro

Le Voyage de Chihiro
Sergent_Pepper
9

Larmes de séduction massive.

Suivre Chihiro dans son voyage est l’occasion d’un rite initiatique qui aura autant d’incidence sur la jeune fille que le spectateur. Chef-d’œuvre de l’animation, le film de Miyazaki est de ceux qui...

le 23 mai 2015

164 j'aime

22

Le Voyage de Chihiro
Psycox
10

Ode à l'imagination

Essuyant de nombreux échecs, je me lance enfin dans une critique de "Le Voyage de Chihiro" qui je le sais va enfin être publiée (ou du moins je l'espère...) ! Je n'aurais jamais cru qu'écrire une...

le 4 févr. 2015

126 j'aime

11

Le Voyage de Chihiro
Petitbarbu
9

Session Ghibli, septième séance : Le Voyage de Chihiro.

Il y a deux approches possibles pour le vilain cinéphilique que je suis - comprendre vilain dans son sens primaire, le roturier, le paysan, le péquenot - lorsqu'il se frotte à la critique, critique...

le 5 août 2015

77 j'aime

29

Du même critique

Pornography
Trelkovsky-
10

Idées noires

Entre 1980 et 1982, le parcours des Cure s'est avéré être d'une cohérence totale : après avoir mis en place une pop introspective extrêmement fine avec Seventeen Seconds, le son curien semble...

le 30 déc. 2013

37 j'aime

4

Django Unchained
Trelkovsky-
5

À tout vouloir justifier ... (spoilers)

Depuis quelques films déjà, Tarantino a comme un besoin de légitimer la violence qu'il filme. Bien sûr, dans les grandiloquents « Kill Bill », l'histoire de vengeance n'était qu'un simple...

le 26 mai 2013

33 j'aime

7

Le Tableau
Trelkovsky-
3

Pour être comme tout le monde ...

Dès le début, le film affiche clairement son postulat : les pauvres gentils et les méchants riches. Dès le début, le réalisateur/moralisateur lance un propos très édifiant à son jeune spectateur :...

le 16 janv. 2012

28 j'aime

4