Pongo et Perdita, un couple de dalmatiens, filent le parfait amour chez leurs maîtres Roger et Anita, un amour couronné par la naissance de 15 chiots. Mais tout change lorsque la terrible Cruella fait enlever les chiots, dans le but d’utiliser leur peau afin d’en faire son plus beau manteau…
Après les résultats décevants du pourtant merveilleux La Belle au bois dormant, il était logique de voir les studios Disney changer de registre avec leur film d’animation suivant. Comme l’annonce d’emblée le générique, que l’on croirait tout droit sorti des comédies en images réelles produits à la même époque par les studios, Les 101 dalmatiens adoptera un ton résolument décalé, à l’encontre des principes de réalisme que Walt Disney recherchait dans ses films depuis Blanche-Neige et les sept nains. Le film du trio gagnant Geronimi/Luske/Reitherman (qui remplace l’habituel Wilfred Jackson) se place davantage dans la lignée du très cartoonesque Dumbo, pour un résultat à peu près aussi bon.
Studios Disney obligent, le film fait encore un pas en avant en termes de progrès technique, utilisant la xérographie, qui permet aux animateurs de photocopier les cellulos et diminue ainsi considérablement leur travail, ces derniers rencontrant beaucoup moins de difficultés à animer les 6 469 952 tâches du film que s’ils avaient dû toutes les dessiner à la main... Mais esthétiquement, ce qui marque le plus, c’est sans doute la dissociation des couleurs et des décors, les lignes des décors étant pour la première fois rassemblées en un calque superposé à des fonds contenant uniquement les couleurs. Cela permet une uniformisation entre les personnages et les décors que l’on n’avait pas connu jusque-là, et rompt avec l’esthétique des films précédents de Disney, apportant un renouveau que l’on accueille volontiers.
Les personnages eux-mêmes sont proches du style de la caricature, ce qui permet de leur donner un caractère extrêmement marqué d’un simple coup d’œil, du fantasque Roger à la douce Anita en passant par l’inénarrable méchante emblématique de Disney, l’hilarante Cruella. On s’y attache donc très vite, et l’on plonge ainsi sans détour dans un scénario qui prend étonnamment son temps, sans jamais être ennuyeux pour autant.
Si l’on exclut la géniale poursuite finale, le rythme est en effet très lent, introduisant dans le récit un sens du suspense certes coutumier de Disney, mais qui se trouve ici poussé à son paroxysme, dans des scènes de cache-cache entre les bandits et les chiens d’une tension à faire pâlir Hitchcock de jalousie. Fort heureusement, cela ne se fait pas au détriment d’un humour toujours juste et jamais envahissant, qui, par son charme et sa délicatesse (délicieuse scène de la télévision, qui ne manque ni de l’un ni de l’autre), achève de faire de ces 101 dalmatiens un bijou emblématique de l’âge d’or des Classiques Disney.