Une critique sans remarques sur le titre VO ni la coiffure de Nicolas Cage
Avec Les ailes de l'enfer, aka Con air en VO, je continue mon visionnage de films avec Nicolas Cage, amorcé par ces vidéos aguichantes présentant le meilleur de ses prestations. Con air ne sent pas vraiment le bon film au premier abord, et d'ailleurs les notes qu'il récolte sur internet ne sont pas glorieuses, et pourtant il fait figure de petit classique du cinéma d'action, au moins autant que The rock, film de la même époque, avec Cage aussi, et que j'ai vu récemment.
Je savais que l'histoire tournait autour d'un avion transportant des prisonniers et qui était détourné, mais c'est à peu près tout. J'aimais néanmoins l'idée que les personnages principaux soient des criminels. J'ai du coup été un peu déçu de découvrir que le héros, Cameron Poe, joué par Cage, est un homme bien, injustement condamné. Qu'on nous donne des héros immoraux !
Je m'y suis fait rapidement, notamment grâce au montage très efficace durant le générique de début, où l'on suit la routine du personnage une fois incarcéré, avec en voix-off la lecture des échanges épistolaires avec sa femme et sa fille ; le texte est plutôt touchant tout en étant bien condensé.
Huit ans après son emprisonnement, Cameron va enfin pouvoir retrouver sa famille. Il embarque dans un avion pour rentrer chez lui, mais, manque de chance, il est en compagnie de détenus qui vont être transférés dans un nouveau pénitencier destinés aux criminels les plus dangereux.
C’est un vol "all-star", comme le dit un personnage, littéralement, vu le casting très surprenant : John Cusack, John Malkovich, Steve Buscemi, Danny Trejo, Ving Rhames, Dave Chapelle. Ils sont moins connus, mais il est tout aussi surprenant de voir Colm Meaney (Get him to the Greek) et Rachel Ticotin (Total recall, Chute libre).
Pour les policiers dans le film, c’est surtout un vol "all-star" car l’avion est bourré de criminels qui ont fait la une des journaux, chacun ayant une backstory intéressante, chaque personnage étant présenté avec une surenchère censée en faire, à nos yeux, les bad motherfuckers ultimes, en quelque sorte.
L’histoire de certains nous est dévoilée à leur arrivée, par le biais de commentaires de la part de policiers, mais pour d’autres le plaisir est gardé pour plus tard, que les criminels se présentent dans l’avion, ou lors d’escales.
Les acteurs sont aussi bons que leurs personnages : Danny Trejo prend visiblement plaisir à jouer un violeur sordide, Malkovich est en forme et s’amuse dans un rôle inattendu pour lui, mais pas aussi inattendu que le rôle attribué à Buscemi, qui joue une sorte d’Hannibal Lecter bis. On a du mal à y croire, mais le décalage entre sa dangerosité supposée et son air de gentil garçon est amusant.
Je regrette que personne ne m’ait jamais dit que dans Con air, il y avait tout cela, et surtout Steve Buscemi en serial killer qui "fait passer la famille Manson pour la famille Partridge", sinon j’aurais vu ce film bien plus tôt !
Du côté des forces de l’ordre, on a droit à quelques personnages hauts en couleur aussi, bien qu’ils correspondent à des figures vues et revues : d’un côté le beauf, de l’autre l’intellectuel à cheval sur les règles ; mais leurs interactions sont suffisamment divertissantes pour qu’on excuse ce manque d’originalité.
La séquence de prise de contrôle de l’avion par les prisonniers est assez peu crédible, mais elle a le don d’être captivante, au moins.
Comme The rock, on peut reconnaître en Con air un divertissement de qualité par la multiplicité des rebondissements, des enjeux, et des menaces qui pèsent sur le héros.
Le scénariste trouve régulièrement de quoi relancer l’intérêt, que ce soit par la présence dans l’avion d’un agent infiltré censé faire parler un trafiquant à bord, ou en faisant qu’un personnage veuille abattre l’avion, tandis qu’un autre pense que Cameron Poe peut servir d’allié à bord.
Le fait d’avoir un héros dans l’avion n’est parfois pas si mal, il est intéressant de voir Nicolas Cage décocher des répliques qui tuent, et s’opposer aux autres sans pour autant se compromettre ; à d’autres moments, ce n’est pas aussi bien, notamment quand il essaye de sauver cet agent des narcotiques débile. Rien que le fait que Cage intervienne est idiot de sa part.
Pour un blockbuster, j’ai été assez étonné de voir quelques idées un peu trash dans Con air, pas dénuées d’humour pour certaines.
Le scénariste organise une rencontre entre le personnage de serial killer de Steve Buscemi et une fillette, je m’attendais à savourer une scène malsaine, mais en fait j’ai presque eu de l’empathie pour le criminel. "You look sick", lui dit la fille, ce à quoi il répond "I am sick" – "Do you take medicine ?" – "There’s no medicine for what I have".
Décidément, Con air est un film surprenant en bien des points.
Il y a même quelques jolis plans, où le cadrage met en avant un élément insolite ou esthétique : un dessin sur un cockpit d’avion, un garde qui transporte des dizaines de menottes sur son dos, suivi en légère contre-plongée, … On dénote là une certaine attention portée aux détails de la part du réalisateur, qui peut disposer une botte trouée au premier plan lorsqu’il filme le désert par exemple. Parfois ça apporte des gags, comme lorsqu’on nous montre l’effet d’un crash d’avion sur une machine à sous à proximité. Le réalisateur a visiblement pris le temps de réfléchir à ce qu’il pouvait ajouter au script par sa mise en scène.
Con air est un film intéressant pour de nombreuses raisons, mais paradoxalement il déçoit par quelques scènes d’action, où il cherche à trop en faire, si bien que ça devient ridicule. La moitié des scènes d’action sont bien, dans l’autre moitié il y a des explosions en CGI datées, et beaucoup d’incohérences (ces policiers armés qui se déplacent tous dans un couloir formé par des véhicules dans une décharge, comme s’ils ne se doutaient pas qu’ils se retrouvent ainsi pris au piège). Il y a aussi cet overkill final, un gros n’importe quoi ; on dirait que le scénariste n’a su se décider sur la façon de tuer le personnage, donc il a enchaîné trois morts différentes.
Le film se conclut sur une destruction massive en ville, qui a probablement valu la mort de nombreux civils, mais ça, on ne le voit pas, et on n’en parle pas. Au lieu de ça, le héros rejoint sa famille tranquillement.
Pour moi Con air est un bon film d’action, avec les habituels moments de n’importe quoi complets, que j’excuse aisément. Mais il comporte également des qualités qu’on ne remarque pas forcément.
Et rétrospectivement, Simon West était un très bon choix pour Expendables 2, il était capable d’apporter l'inventivité, la démesure et le délire qui manquaient au premier épisode.