Voilà un film qui se regarde dans le miroir de son narcissisme. Autobiographiquement assumé, VBT replonge dans l'album de ses débuts dont elle feuillette les pages des eighties au travers de ses souvenirs , qui admiratifs de la figure du commandeur Patrice Chéreau, qui goguenards des frasques amoureuses et/ou farceuses d'une troupe de jeunes comédiens plus soucieux de sniffer de la came, de s'envoyer en l'air et de pratiquer des conduites à risque plutôt que d'affûter leur éducation théâtrale. Tout ce petit monde crie, rampe, ondule, s'embrasse et s'agite à la façon de mouches dans un bocal, confondant hystérie et jeu dramatique.
Ça fleure mauvais le nombrilisme d'un microcosme déconnecté du réel quand dehors gronde le spectre du sida et que menacent les volutes radioactives de Tchernobyl. Alors le théâtre de la vie va perfuser la vie au théâtre en distillant ses poisons multiples, dépit amoureux, homosexualité, insouciance juvénile, violences affectives, avortement, suicide. La réalisatrice ratisse large, mais oublie au passage d'en approfondir les causes. Ce n'est pas son propos me direz-vous, mais alors de quoi s'agit-il? Du jeu de masques qui fait l'essence même du théâtre ? Mais les allers-retours entre les rôles joués par les comédiens et leur impact sur leurs comportements intimes sont faibles, voire inexistants. Du paradoxe du comédien et de la distanciation brechtienne? Mais les techniques d'expulsion du moi (transes physiques à l'Actor Studio, reptations, recherche de vérité par le surgissement des sensibilités et des émotions sous la conduite dictatoriale d'un Chéreau) sont submergées par l'hystérie de la mise en scène qui joue de cette confusion sans jamais la désigner en tant que telle.
Faux semblants (baisers simulés ou non?) mais vrais penchants (pour la drogue, le sexe, le risque), le va et vient des uns vers les autres étourdit sans jamais émouvoir et l'on abandonne très vite les personnages à leur sort, tant ils regardent leur propre nombril comme le centre du monde. N'était que je donne toujours la chance à un film de se racheter dans son déroulement et reste ainsi jusqu'à sa fin, je serais sorti de la salle passées les dix premières minutes. D'autant que le filmage s'est fait à la hache : hysterisation de la caméra (?), plans filmés à l'épaule et à la main tremblotante (comme le ferait mon beauf les jours d'anniversaire), choix de cadrages souvent improbables, gros grain sale de l'image pour authentifier un passé mythifié, mais de mise en scène point. Suggérons à VBT l'achat d'une steadycam et d'un pied de caméra. Certaines séquences relèvent quasiment du micro-trottoir (celle par exemple de l'annonce des résultats) quand d'autres font penser à des docuculs ( ainsi la séance inaugurale des essais où alternent les mines condescendantes des examinateurs avec celles inquiètes des postulant(e)s).
En résumé,vous aurez compris que j'ai détesté ce film décrivant les agitations pleines de vanité et de suffisance de la secte des adorateurs de la Scène.