Les Amours imaginaires par Aeneman
Pitch:
Francis et Marie, deux amis, tombent amoureux de la même personne. Leur trio va rapidement se transformer en relation malsaine où chacun va tenter d'interpréter à sa manière les mots et gestes de celui qu'il aime...
2ème film du prodige et souvent détesté, Xavier Dolan, Les amours imaginaires relate l'histoire éternelle que subissent parfois un trio de 3 personnes. Hétéros, gays, transexuels, ou peu importe, ici Xavier Dolan explore autant les relations platoniques que les...amours imaginés, rêvés, que l'on se fait parfois.
Lors d'une soirée, Francis (Xavier Dolan) esthète et poseur de son état, avec son amie Marie femme fan du vintage et fille de bonne manières, rencontrent un angelot comme ils l'appellent, créature à la beauté ancienne, grecque, qui soudain va arrêter le temps et les faire tomber profondément amoureux: Nicolas (Niels Schneider).
Ainsi, plongeant les deux dans un combat pour gagner l'amour de Nicolas, Francis et Marie vont ruser de stratagèmes pour attirer l'attention du dieu amour qu'ils ont devant leurs yeux.
Ainsi, l'amitié longtemps vécue, se brise, se perd peu à peu, se dilue et les silences gênés font place aux rires crispés, à l'innocence rêvée et malsaine que donne Nicolas à ses esclaves amoureux.
L'amour y est ainsi vécu en 4 temps, comme les saisons il apparaît beau et fantasque, capricieux comme le printemps. Radieux et fascinant comme l'été. Fâcheux et égoïste comme l'automne qui peu à peu survient, puis finalement triste et "désolé j'aurais toujours quelque chose d'autre à faire" comme l'hiver.
Ainsi lorsque le charme se romp, le retour à la réalité sera brutal, comme si la perte de l'innocence nous ramenait également en tant que spectateur au cruel chemin qui ne sera jamais le sien.
Il y a un côté extrêment plaisant dans le cinéma de Xavier Dolan, il n'est pas qu'esthétique, il est également sensuel, charmeur, profond et artificiel en même temps, il est "beau".
En même temps qu'il convoque ses inspirations: Wong Kar Wai, Jean-Luc Godard, Almodóvar; Xavier Dolan les recrache, et les digère au passage pour donner sa vision du cinéma à ce jour.
Peut-être ainsi la démarche peut sembler prétentieuse, pourtant elle est tout à son honneur, tant artistiquement refléter à la fois le quotidien, et l'attente dans cette antichambre des relations floues peut être difficile à représenter.
Nous avons tous connu celà, ce moment où l'on se sent fragile, prêt à s'accorder un abandon, prêt à se livrer à l'autre mais toujours à garder une retenue au cas où cela tournerait mal. Et l'on sait que ce n'est qu'un rêve auquel on court.
C'est dans ces visions poétiques, au ralenti la plupart du temps avec une bande-son entêtante, éclectique et épousant le propos au possible: The Knife, Fever Ray, Bach, Indochine, Dalida; que le film doit l'un de ses autres forces.
Sans doute, la combinaison "ralentis + musique classique" notamment peut agacer, n'empêche elle se justifie tant l'on aimerait suspendre le temps dans ces moments là, tant le temps dans ce moments là semble suspendu.
Mais la tragédie grecque moderne de ce trio, de ces couples interludes fascinants car proches de soi forment la beauté et le geste brutal qu'est l'amour.
Car oui, les Amours Imaginaires parle surtout et énormément d'amour. Et en ce sens, Xavier Dolan a déjà presque tout compris.
Une pure merveille suspendue, hors du temps.
Note: 10/10
Trailer: http://youtu.be/6gCPIof4kNQ