Il fut un temps, je dévorais chaque tome annuel de la saga Harry Potter avec une ferveur incroyable. Puis les adaptations cinématographiques, de qualité tout à fait inégale, se sont égrenées les unes après les autres, entraînant leurs lots de déceptions. Outres des lacunes techniques, une adaptation peut pêcher par les choix discutables d'un réalisateur de contraindre l'oeuvre originale pour la faire entrer au forceps dans un format ô combien codifié. Difficile alors de restituer la profondeur et la créativité d'une société britannique magique imaginée par son auteure et développée progressivement au fil de centaines de pages.
Les Animaux Fantastiques présente donc un énorme avantage : celui de n'être pensé que pour le cinéma. Le produit final est donc un objet filmique plutôt équilibré, auquel on ne pourra donc reprocher des coupes franches et des impasses impardonnables.
Se déroulant 70 ans avant le cycle Harry Potter, ce premier volet d'une nouvelle saga pose les bases d'un univers qui engendrera (sans spoil) une partie des relations à l'origine de la situation dans laquelle s'ancrait la saga originale. Pas de révélation fracassante, mais plutôt une belle exposition et une mise en place de nouveaux intrigants dont on se doute que les agissements auront de grandes répercussions sur le monde magique.
D'abord très féerique, le film réussit à déstabiliser le spectateur en retrouvant rapidement le style de Yates imprimé sur les adaptations des dernières années de Harry à Poudlard : un monde poisseux en proie à la panique et au désespoir, vu à travers les yeux d'un jeune adulte dépassé par les événements.
Et c'est en Norbert Dragaunneau (interprété par Eddie Redmayne) qu'il faut voir un des intérêts principaux des Animaux Fantastiques : un personnage aux antipodes du héros à la cicatrice. Pourtant, des cicatrices ce nouveau semble en avoir, beaucoup plus intimes : introverti, rêveur, génial mais maladroit, Norbert traîne un héritage et une mélancolie touchante, stigmate d'un passé qu'il peine à dissimuler. Si l'on ajoute sa nationalité, le fait qu'il revêt un nœud papillon et porte une mallette plus grande à l'intérieur tout en résolvant bien des situations en brandissant un objet magique longiligne, un parallèle troublant avec le 11° Docteur, personnage incarné par Matt Smith semble tout trouvé. Difficile de ne pas se prendre d'affection pour ce "nouveau" personnage.
La galerie de personnages secondaires n'est d'ailleurs pas en reste, bénéficiant d'une écriture simple mais soignée qui a le bon goût d'esquiver les archétypes fainéants. Outre un ancrage dans une société que nous découvrons au travers des yeux de Norbert, une certaine alchimie opère et garantit une belle cohérence à l'univers.
Enfin, techniquement, le film réussit à créer de belles atmosphères, tantôt merveilleuses, tantôt sombres grâce à de très belles compositions et un excellent travail sur les décors. Les scènes d'actions, grandement dynamisées par le transplanage, sont pour la plupart très dynamiques et d'une lisibilité rarement prise à défaut.
Les Animaux Fantastiques constitue donc une excellente opportunité de se plonger de nouveau dans l'univers d'Harry Potter et un excellent choix pour s'émerveiller en cette fin d'année, loin des premiers frimas de novembre.