Deux frères, un casse qui tourne mal, quatre ans de prison pour l’un, et une femme entre les deux. Quand Kenny ressort, il ne sait pas que Dave est désormais en couple avec Sylvie, celle avec qui il était avant et celle qu’il aime encore, à fond. Sylvie qui n’a pas voulu l’attendre, Sylvie qui est passée à autre chose, Sylvie qui a voulu refaire sa vie, avec Dave. Alors comment l’annoncer à Kenny ? Comment lui dire quand celui-ci n’est qu’une boule de nerfs entaillée, pitbull enragé et jaloux qui voudrait se remettre avec Sylvie ? Malaise, gros malaise. Sous le ciel bas et les nuages gris de la banlieue d’Anvers, une simili tragédie gronde et se prépare à tout niquer.
Sorte de chronique sociale blafarde et âpre (sous influences Ken Loach, les Dardenne un peu et Nicolas Winding Refn période Pusher si vraiment on est bien luné) doublée d’un drame amoureux électrique, Les Ardennes se suit d’abord avec un certain intérêt, rythmé constamment par une techno agressive. Sans surprises mais bien troussé, et surtout bien interprété par trois acteurs convaincants (Jeroen Perceval, Veerle Baetens et surtout Kevin Janssens dans le rôle de Kenny), le premier long-métrage de Robin Pront arrive à séduire au moins dans sa première heure en explorant, à sa manière (forte), les motifs rebattus du récit social (précarité, chômage, violence ordinaire…).
Et puis c’est le drame : le film, dans son dernier tiers, vire soudain au truc de genre maladroit qui veut se donner des airs, qui se voudrait roublard (et qui l’est, mais de façon grossière) et qui rappelle vaguement, très vaguement, l’univers de Fabrice Du Welz mâtiné d’une mauvaise série B (voire Z par moments). Certes, on sent chez Pront un désir et un amour du cinéma inépuisables, gigantissimes, baignés d’influences et de styles divers, mais celui-ci ne s’en sert finalement que pour soigner ses petits effets, épater la galerie plutôt que de se les réapproprier avec une belle originalité, avec de l’envergure (on pense alors, récemment, à Ryan Gosling et son magnifique Lost river). Erreur de débutant on va dire, consumé par ses envies et le feu de l’action.
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