Que trouve-t-on, sous la terre boueuse des Ardennes ? Qu'a-t-il gardé en mémoire, ce sol qui a un pied en France, et l'autre en Belgique ? Parfois, à la faveur d'une balade dans ses forêts, on tombe sur des véhicules militaires abandonnés là, vestiges d'une sanglante bataille, métalliques stigmates de la barbarie qui s'est jouée sur ce territoire en 1944.


C'est sur ce sol violent, hanté de tant de cadavres, que Robin Pront ancre son récit : il y campe deux frères, Dave et Kenny, rejetons d'une ville miséreuse, petites frappes si coutumières de la délinquance que, suite à un braquage raté, Kenny plonge pour 4 ans de prison. On a beaucoup cité Bullhead, bien sûr, comme brillant parrain spirituel de ce film : même langue gutturale, même atmosphère flamande, violente, menaçante, sale et ténébreuse, d'où semblent pouvoir surgir toutes les plus cruelles surprises.


En partant pour la tôle, Kenny a laissé une amoureuse derrière lui, Sylvie - l'Elise de Broken Circle Breakdown - une jeune femme qui tente de sortir de la drogue et qui ne tarde pas à s'éprendre du frère resté libre. Quatre ans plus tard, Kenny l'ultra-violent, le sanguin explosif, sort de cellule, sans savoir bien évidemment que sa dulcinée a changé d'amour.


La mise en scène rend parfaitement compte de la tension qui s'installe entre les frères, et l'étrangeté de l'atmosphère grimpe en flèche, s'obscurcit de desseins encore impalpables, avec cette étonnante bande-originale house qui renvoie au monde de la nuit et ses excès en tous genres.


Le flamand ne fait pas dans la dentelle, délaisse généralement les happy ends et n'épargne pas le spectateur qui assiste, ébahi à la scène finale, véritable uppercut scénaristique qui m'a laissée pantoise, les yeux écarquillés, pendant à peu près 5min.


Même si certaines scènes auraient pu être encore plus grandioses, la tension encore plus forte, certains plans raccourcis, Les Ardennes reste un film brillant, visuellement très abouti, mis en scène avec intelligence et noirceur, dont on ne sort pas indemne.

BrunePlatine
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les films aux meilleures bandes originales et Chocs cinématographiques [2016]

Créée

le 3 nov. 2016

Critique lue 1.3K fois

21 j'aime

3 commentaires

Critique lue 1.3K fois

21
3

D'autres avis sur Les Ardennes

Les Ardennes
Fritz_Langueur
10

Le rouge pourpre des chairs...

Véritable objet de marketing, une bande annonce trop axée vers une cible précise peut, in fine, desservir un film. A trop nous présenter « Les Ardennes » comme un polar punchy, genre ambiance...

le 19 avr. 2016

34 j'aime

5

Les Ardennes
BrunePlatine
8

Frères de sang

Que trouve-t-on, sous la terre boueuse des Ardennes ? Qu'a-t-il gardé en mémoire, ce sol qui a un pied en France, et l'autre en Belgique ? Parfois, à la faveur d'une balade dans ses forêts, on tombe...

le 3 nov. 2016

21 j'aime

3

Les Ardennes
oso
7

La charge du marcassin

Même s’il souffre des excès caractéristiques d’un premier film, à savoir une mise en scène parfois poseuse et une écriture qui se laisse aller à la surenchère, Les Ardennes est une belle surprise...

Par

le 16 avr. 2016

17 j'aime

4

Du même critique

Enter the Void
BrunePlatine
9

Ashes to ashes

Voilà un film qui divise, auquel vous avez mis entre 1 et 10. On ne peut pas faire plus extrême ! Rien de plus normal, il constitue une proposition de cinéma très singulière à laquelle on peut...

le 5 déc. 2015

80 j'aime

11

Mad Max - Fury Road
BrunePlatine
10

Hot wheels

Des mois que j'attends ça, que j'attends cette énorme claque dont j'avais pressenti la force dès début mai, dès que j'avais entraperçu un bout du trailer sur Youtube, j'avais bien vu que ce film...

le 17 déc. 2015

77 j'aime

25

Soumission
BrunePlatine
8

Islamophobe ? Vraiment ? L'avez-vous lu ?

A entendre les différentes critiques - de Manuel Valls à Ali Baddou - concernant le dernier Houellebecq, on s'attend à lire un brûlot fasciste, commis à la solde du Front national. Après avoir...

le 23 janv. 2015

72 j'aime

27